Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
1 juillet 2022

Ardèche sans trains de voyageurs depuis 40 ans : 2 - forces et faiblesse du réseau d'autocars

Dix-huit lignes départementales, quatre lignes régionales express : telle est la consistance aujourd’hui du réseau de transports publics interurbains de l’Ardèche, entièrement routier depuis la disparition en 1973 des dernières liaisons ferroviaires dans ce département privé de toute gare voyageurs ainsi que nous l'avons détaillé dans le précédent article de Raildusud. L’Ardèche constitue un exemple de transport collectif entièrement routier, en interne comme vers les villes voisines. Il est intéressant de l’examiner à ce titre.

Les lignes régionales express X73 et X74 sont les seules à relier deux des trois grands bassins du département: le sud (Les Vans, Aubenas) et le centre (Privas, La Voulte et, au-delà, Valence ou Montélimar). Le bassin septentrional (Annonay, Tournon) fonctionne en circuit fermé en matière de transport interurbain, orienté vers Le Péage de Roussillon et Lyon avec la ligne régionale express X75 et vers Saint-Etienne. Le réseau est largement orienté vers la vallée du Rhône.

Deux pôles principaux, Aubenas et Annonay

 Côté réseau intradépartemental, seuls deux grands pôles ressortent : Aubenas au sud et Annonay au nord, dotés chacun d’une étoile relativement fournie, explicable par leur poids démographique.  

 Privas, peuplé de 8.500 habitants sur sa commune mais de 43.600 habitants  habitants sur sa vaste zone agglomérée, quoique préfecture ne dispose que de deux lignes. La première est la transversale X73 Valence-TGV-Privas-Aubenas-Les Vans, dotée en semaine de 10 allers-retours quotidiens de bout en bout soit quelque 130 km parcourus en 2 h 21 mn.  Deux de ces rotations ne sont amorcées qu’à Valence-Ville. Cette ligne régionale express est complétée par 13 services Valence-Privas (53 km) et 2 Privas-Aubenas (30 km). La trame est allégée de près de moitié les samedis et dimanches.

Carte du réseau du transport routier collectif de voyageurs en Ardèche éditée par les services de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Manquent deux lignes du réseau de la Loire, qui desservent Annonay depuis le nord. 

 L’autre ligne desservant Privas est la E18 qui la relie à Cruas dans la vallée du Rhône, au Teil et à Montélimar, soit environ 46 km. Cette ligne d’orientation nord-ouest-sud-est est dotée de 8 allers-retours quotidiens en semaine, de 6 les samedis et d’un seul les dimanches. Entre Le Teil et Montélimar, s’ajoutent 4 rotations de la ligne E19 qui parcourent les 7 km séparant les deux villes qui se font face de part et d’autre du Rhône en 10 minutes.

Pour Annonay, deux lignes fortes vers Valence et Saint-Etienne, cinq services express vers Lyon

 Au nord, est proposée une ligne Valence-Annonay (E3) dotée de 10 allers-retours en semaine et période scolaire (6 les samedis et 4 les dimanches) avec des autocars qui parcourent les quelques 70 km en deux heures. Cette ligne est limitée à la gare de Valence-Ville, les habitants d’Annonay étant censés prendre le TGV côté Lyon grâce à la ligne régionale express X75.

 Cette ligne X75 offre 5 allers-retours Annonay-Lyon (75 km) dont 2 en correspondance à Part-Dieu et 3 à Perrache avec des TGV, mais uniquement Paris. S’ajoutent 9 rotations Annonay-Le Péage de Roussillon (23 km par Peaugres) en correspondance avec des TER de la rive gauche du Rhône. Notons que cette dernière gare n’est pas desservie par les 5 missions Annonay-Lyon, le tronc commun des 14 rotations se limitant à la partie montagneuse Annonay-Serrières (7 stations sur 9 du parcours Annonay-Le Péage de Roussillon). Une ligne E4 dotée de 6 rotations par jour en semaine scolaire (exclusivement) relie par ailleurs Annonay au Rhône et à diverses localités : Peyraud, Saint-Rambert d’Albon, Le Péage de Roussillon.

Ardèche Ligne Annonay

Sur la ligne Firminy-Annonay-Peyraud-Saint-Rambert d'Albon, à Pont-Salomon, première station en Haute-Loire depuis Firminy. Cette ligne de 84,26km mise en service en 1885 dans sa totalité effectuait un parcours audacieux, avec des déclivités de 30 mm/m et un tracé hélocïdal autour de Bourg-Argental (Loire). La desserte voyageurs a été fermée dès 1940 entre Dunières et Annonay, en 1958 entre Annonay et Peyraud avec suppression du dernier autorail tracé jusqu'à Saint-Rambert d'Albon. C'est un élement du maillage ferroviaire de toute une région qui disparaissait. 

 Les habitants d’Annonay usagers du transport public sont donc contraints, pour prendre des TGV vers le Sud (Provence-Alpes-Côte d’Azur, Occitanie, Espagne…) de subir deux correspondances à Valence (-Ville gare routière et –TGV). Pour accéder à d’autres correspondances que celles vers Paris à Lyon, ils sont souvent obligés de subir deux correspondances (Péage de Roussillon et Lyon).

 Vers l’ouest et Saint-Etienne, Annonay est mieux desservi avec une ligne L17 du réseau de la Loire offrant 10 rotations quotidiennes Saint-Etienne-Annonay en semaine. (1)

Pas de service continu nord-sud sur la rive droite du Rhône

 La rive droite du Rhône ardéchoise n’est parcourue par aucun service d’autocars de bout en bout qui remplaceraient les anciens services ferroviaires voyageurs disparus en 1973. Les services sont segmentés en fonction des liaisons qu’ils opèrent avec les villes de la rive gauche. Au nord de Saint-Péray (Valence), elle est desservie par la ligne Valence-Annonay E3.

  Au sud, (Baix-Pont-Saint-Esprit) elle est desservie par deux lignes : la E18 Privas-Montélimar de Baix au Teil, la E20 Montélimar-Pont-Saint-Esprit et la E18 entre Viviers, Le Teil et Montélimar. La E20 offre 5 rotations quotidiennes en semaine scolaire de bout en bout (60 km), service légèrement modifié en vacances scolaires et desserte de Saint Martin d’Ardèche en vacances d’été par deux rotations, l’un d’elle se limitant à cette localité. A Bourg-Saint-Andéol, correspondance est possible avec la E22 vers Vallon Pont-d’Arc, site touristique jadis brièvement desservi par tramway. Ce site est par ailleurs desservi par la ligne régionale express X76 amorcée à Valence via Montélimar et par la ligne E15 Aubenas-Avignon (2 rotations quotidiennes de bout en bout en semaine, complétées par 5 AR Aubenas-Vallon Pont-d’Arc et 2 AR Vallon Pont-Arc-Avignon en été. Dans cette dernière ville, les deux gares TGV et Centre sont desservies.

 Dans le bassin méridional intérieur de l’Ardèche, Aubenas est dotée d’une importante étoile de lignes d’autocars avec 9 lignes au total : vers Langogne (Lozère) par la E17 (un seul AR l’été en semaine, complété par 1 AR Aubenas-Mayres à longueur d’année) et vers les destinations plus proches de La Souche (E10, 2 rotations de bout en bout en semaine scolaire), Montpezat et Burzet (E16, 2 rotations par antenne en semaine scolaire),  Vals-les-Bains et Antraigues (E9, 1 rotation de bout en bout en semaine scolaire).

 Ce rapide tour d’horizon n’épuise pas le sujet mais permet de montrer quelques constantes ans la conception du réseau et sa tentative d’adaptation aux réalités topographiques et humaines.

Forte diamétrale Valence-Les Vans mais dessertes ex-CFD démaillées

 L’importance de la diamétrale Valence-Privas-Aubenas-Les Vans, ligne relativement bien fournie malgré sa longueur et qui reprend l’ancien axe principal des Tramways de l’Ardèche. Force est donc de reconnaître la côté visionnaire des concepteurs de ces derniers, pénalisés à la fois par la conception par trop économe du réseau et par les circonstances économiques et politiques (guerre de 1914-1918).

 Au nord, l’ancienne ligne Saint-Rambert d’Albon-Annonay-Dunières-Firminy est remplacée par deux lignes d’autocars origine Annonay.

Contrairement à l’ancien réseau ferré CFD, Le Cheylard ne dispose plus que d’une seule destination (vers La Voulte et Valence) contre trois à l’époque (La Voulte, Tournon, Dunières).

Fiche horaire de la ligne régionale express X74 entre Valence TGV et Les Vans. C'est la principale transversale départementale, amorcée au gand pôle transport que constitue Valence (TER, TGV, autocars, autobus). (Doc. Région AuRA) 

 Au sud, l’ancien axe ferroviaire Le Teil-Alès avec antenne Aubenas Lalevade/Largentière a disparu en tant que ligne continue de la carte des liaisons routières. Une ligne Aubenas-Alès (E13) la remplace au sud-ouest à raison de 4 rotations par jour en semaine en 2 h 33 mn pour 75 km, auxquelles s’ajoutent 7 rotations Les Vans-Aubenas et une Les Vans-Alès. A l’est, la liaison Aubenas-Le Teil-Montélimar est assurée par une autre ligne, la régionale express X74 qui offre la fréquence remarquable de 18 rotations de bout en bout en semaine en 1 h 16 mn pour 35 km jusqu’au Teil et 41 km jusqu’à Montélimar. Une de ces relations est poursuive à Valence TGV au nord et aux Vans au sud.

L’axe principal des éphémères tramways est aujourd’hui l’une des principales lignes d’autocars

 Il est amusant de constater qu’en 2022, la dorsale Valence-Les Vans, élément le plus fragile de l’ancien réseau ferré (tramway de l’Ardèche) qui ne survécut dans son intégralité que quatre courtes années, est aujourd’hui l’une des principales lignes routières du département. Quant au reste du réseau d’autocars, il démontre combien le plateau et la montagne ardéchois sont orientés vers les pôles urbains et de transport ferroviaire de la vallée du Rhône drômois, vauclusiens, isérois et rhodaniens.

 Si le transport routier paraît pertinent sur certains axes, on ne peut que déplorer la liquidation des lignes ferroviaires d’Annonay, des CFD et du Teil-Alès qui avaient l’intérêt d’allier desserte de cabotage et liaisons interdépartementales, même si l’offre après-guerre était parfois dissuasive.

 A l’horaire 1956, on relevait chaque jour 3 autorails Le Teil-Voguë-Aubenas-Lalevade dont un amorcé à Valence via Livron. Etrangement, ces trois trains circulaient le matin seulement, aucun ne circulant dans ce sens l’après-midi. Le retour Lalevade-Le Teil était en revanche équilibré, avec des départs de Lalevade à 7 h 25, 9 h 32 (poursuivi à Valence) et 19 h 00. Pour la section sud vers Alès, seuls deux allers-retours quotidiens étaient proposés, l’un jusqu’à Robiac avec correspondance rapide vers Alès par un autorail amorcé à Bessèges, l’autre jusqu’à Alès. Le dimanche était prévue une troisième circulation Voguë-Alès.

Page de l'indicateur Chaix pour 1958, au tableau de la transversale du sud de l'Ardèche et de ses antennes. L'offre voyageurs est maigre et déjà segmentée. Les correspondances (à Voguë ou Robiac) sont néanmoins de qualité...

 Tout voyage entre les deux pôles d’Alès et d’Aubenas imposait donc au moins une (le dimanche), voire deux correspondances (en semaine). Le premier train du matin depuis Voguë ne relevait pas de correspondance train depuis Lalevade et Aubenas. Ces horaires étaient le moyen idéal pour décourager la clientèle sur une distance de seulement 82 km avec des vitesses commerciales notoirement faibles : circulations omnibus et autorails légers.

 Rénovées, modernisées et dotées de fréquences correctes, ces lignes présenteraient aujourd’hui un attrait touristique qui constitueraient un heureux complément à leur utilité sociale et économique dans un département à la diversité géographique remarquable, comme en témoigne le succès non démenti de la section Tournon-Lamastre aujourd’hui exploitée touristiquement en saison par les chemins de fer du Vivarais. Leurs jonctions avec la ligne de la rive droite du Rhône valoriserait d'autant cette dernière. 

FIN

(Lire aussi notre article du 26 juin)

- - - - -

(1) La mairie d’Annonay offre un résumé intéressant de ces services sur une page de son site, signe de son souci de valoriser le transport collectif dans une région sans trains :

Horaires des lignes regulieres de transport en autocar et en train - Annonay - Ardeche

Mon itinéraire vers la gare routière d'Annonay, au départ de : Mon itinéraire depuis la gare routière d'Annonay, vers : Parkings à proximité : Parking commerces av. Jean Jaurès (à 85 mètres) - Avenue Jean Jaurès. Parking de 100 places (réservé clientèle commerces) Gratuit.

https://mairie-annonay.fr

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
  • Le chemin de fer est indispensable à toutes nos villes et ne doit pas être l'apanage de la seule région-capitale. Les lignes transversales, régionales et interrégionales doivent contribuer à une France multipolaire, équitable au plan social et territorial.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Newsletter
Publicité