Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
4 août 2023

La politique zéro euro d'Auvergne-Rhône-Alpes pour les voies du réseau régional dans le contrat avec l'Etat suscite l'émoi *

(Complété ce 4 août 2023 avec hypothèse politique au §1 et Occitanie au §2)

 En termes de maintien ou de redéveloppement de son réseau ferroviaire régional, la région Auvergne-Rhône-Alpes affiche sans doute le bilan le plus décourageant des régions françaises pour la période récente. Ont été privées de trains les sections Boën-Thiers et Oyonnax-Saint-Claude, après Laqueuille-Ussel. Cette situation suscite une levée de bouclier de douze associations ou fédérations d’associations contre, en particulier, le  refus catégorique par la région, à l'ouverture des négociations du volte mobilités du contrat de plan Etat-Région de financer ou cofinancer la rénovation ou la réouverture de lignes régionales. La position du conseil régional pourrait consister à vouloir négocier le financement des infrastructures dossier par dossier hors CPER. Le volet mobilités du CPER Auvergne-Rhône-Alpes pourrait dans cette hypothèse ne pas être signé, renvoyant à une politique de négociations au cas par cas.

 Tandis que la quasi-totalité des régions métropolitaines acceptent de mettre la main au portefeuille pour restaurer les « petites » lignes menacées dans le cadre des CPER, voire rouvrir des lignes neutralisées, Auvergne-Rhône-Alpes, par la voie du président de son conseil régional Laurent Wauquiez et de son vice-président chargé des Transports Frédéric Aguillera, a déclaré refuser désormais de mettre le moindre euro dans les travaux d’infrastructure, dès l'ouverture des négociation du volet mobilités du CPER. Dans un passé récent, elle avait accepté de cofinancer la belle rénovation de (Saint-Etienne) Firminy-Le Puy, de Montbrison-Boën ou d’antennes résiduelles dédiées au fret (Volvic-Le Mont-Dore…). Notons que la négociation du volet mobilités des CPER paraît actuellement mal engagée en Occitanie et que la Bretagne ne financera pas, dans ce cadre, la rénovation de ses (rares) lignes de desserte fine.

Un vœu ouvert à la signature des élus

 Douze organisations ont lancé un appel solennel, sous forme d’un vœu ouvert à la signature des élus de toutes les collectivités de la région. Ce collectif réunit en particulier le collectif LeTrain634269 qui fédère des particuliers, des élus, des collectivités en faveur de la réouverture du tronçon de 48 km entre Boën et Thiers, section neutralisée en 2016 qui condamne toute relation ferroviaire directe entre Clermont-Ferrand et Saint-Etienne, la section Massif central Haute-Loire du collectif indépendant Nous Voyageurs ! Masif central, qui milite pour la défense et la promotion des lignes du Massif central, le collectif des Usagers des Transports du Haut Allier ou encore Ocivelo, association d’usagers du vélo du département de la Loire.

IMG_20230710_083019_1Rame tractée de voitures Corail  sur l'estacade qui traverse le centre de Grenoble, assurant un TER Valence-Ville-Annecy. Les dirigeants d'Auvergne-Rhône-Alpes avancent deux arguments pour refuser de cofinancer le réseau dans le caddre du CPER: la responsabilité de l'Etat seul propriétaire des lignes ; et la nécessité de renouveler le matériel roulant TER. De fait, les Corail du Sillon alpin accusent leur âge et surtout leur manque de rénovation, malgré leur capacité et leur confort exceptionnel (roulement et baies vitrées). ©RDS 

« Extrêmement lasses du jeu que la Région mène au sujet du ferroviaire soi-disant contre l’Etat et la SNCF sur le dos des citoyens », les premiers élus et associatifs signataires exigent « un changement radical de comportement politique et plus d’intérêt pour le train dans la région ainsi que pour les citoyens qui le prennent, de la part de l‘équipe au pouvoir depuis 2016 ».

 Etablissant un compte des prévisions de financement des infrastructures ferroviaires régionales, les organisation signataires de l’appel estiment que le CPER Mobilités en cours de négociation entre la région Auvergne-Rhône-Alpes et l’Etat est largement insuffisant face aux besoins : « 54 millions d’euros jusqu’en 2027 : c’est le montant qui sera attribué par l’État au ferroviaire dans la région que préside Laurent Wauquiez, bien décidé de ne pas mettre un centime dans l’infrastructure, dans le réseau ferré, alors que tous les autres conseils régionaux du pays y contribuent, dans le cadre de la loi LOM (Loi d’orientation des mobilités). » Ces 54 millions n’atteignent même pas la moitié du devis pour la réouverture de Boën-Thiers, devis il est vrai établi par SNCF Réseau.

L’un des budgets ferroviaires « des plus compressés de France » qui menace de nouvelles lignes

 Les signataires estiment que c’est « sans précédent » et le train régional, avec un budget pareil, devient selon eux « l’un des plus compressés de France », courant « à la catastrophe sur tout le réseau de petites lignes ». Les associations estiment que dans ce contexte « des fermetures de lignes pour non-entretien » vont intervenir, ainsi que « l’abandon des projets de réouverture indispensables car demandés par la population ».

 Au sujet de la menace d’un manque de maintenance ou de remise à niveau, on peut citer le projet de seconde vague de travaux de rénovation prévue pour les années à venir de Grenoble-Veynes, la magnifique « ligne des Alpes » qui dans la Suisse voisine serait exploitée comme un joyau ferroviaire de rayonnement international.

Oyonnax_-_vue_des_railsGare d'Oyonnax. Cet établissement est désormais terminus des TER provenant de Lyon par Bourg, la ligne poursuivant vers Saint-Claude étant neutralisée. L'offre vers le Jura est basculée sur route, malgré l'importance du trafic sur la départementale parallèle à la voie ferrée. Sans financement, l'accès ferroviaire à la gare d'Oyonnax depuis Lyon sera lui-même menacé. (Doc. Vue des Rails) 

 Seraient concernées aussi plusieurs sections parcourues très majoritaire ou uniquement par des TER, telles Nurieux-Oyonnax (Ain) ou les lignes birégionales Lozanne-Chaufailles (Paray-le-Monial) et (Paray-le-Monial) Gilly-sur-Loire-Moulins, Montluçon-Lavaufranche (Guéret), Le Puy-Saint-Georges d’Aurac, voire les axes nord-sud des Cévennes ou des Causses sur leur parcours septentrional situé en Auvergne-Rhône-Alpes.

 Sur la ligne des Causses Béziers-Neussargues, la section située en Auvergne-Rhône-Alpes au sud de Neussargues pourrait, selon de récentes informations, être rénovées aux frais de l’Etat puisqu’elle supporte un trafic fret au service de l’importante usine ArcelorMittal de Saint-Chély-d’Apcher (Lozère).

Les demandes de réouvertures seraient enterrées

 Quant aux demandes de lignes en attente d’une éventuelle réouverture, sans « le moindre euro » du conseil régional nul doute que leur destin serait celui du déclassement définitif et de l’aliénation des emprises. Il s’agit principalement de Boën-Thiers, neutralisée depuis juin 2016, de la section birégionale Oyonnax-Saint-Claude, interdite à la circulation depuis décembre 2017 et de Laqueuille-Eygurande-Merlines (Ussel) neutralisée depuis 2014.

On notera que dans son avant-projet d’allotissement des services TER dans la perspective d’une mise en concurrence par appels d’offre, le conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes a d’ores et déjà prévu d’intégrer la partie occidentale Thiers-Clermont-Ferrand de l’axe interrompu Saint-Etienne-Clermont-Ferrand au lot Massif central, tandis que l’a partie orientale Saint-Etienne-Boën serait intégrée dans un lot Etoile lyonnaise. Il semble ainsi entériner la partition de la ligne ferroviaire au bénéfice du transport routier.

DSC04909Gare de Bonson (Loire) sur la ligne Saint-Etienne-Clermont-Ferrand. Cet établissement fut gare de jonction avec la ligne Bonson-Sembadel qui permettait d'atteindre directement en train les monts du Forez et la ligne Vichy-Darsac (Le Puy) qui dessert en particulier Ambert, Arlanc, La Chaise-Dieu. La fermeture de Bonson-Sembadel et l'interruption de tout trafic entre Boën et Thiers sur l'axe Saint-Etienne-Clermont-Ferrand illustrent le démaillage dramatique du réseau ferroviaire régional. ©RDS 

 La région Auvergne-Rhône-Alpes se distingue ainsi nettement de ses consoeurs. Dans la partie méridionale de la France, tous les conseils régionaux investissent dans les infrastructures ferroviaires. La région Occitanie a lancé un plan d’investissement de 800 millions d’euros avec prise en gestion directe de sections neutralisées qu’elle compte réouvrir : Alès-Bessèges et Montréjeau-Luchon. Comme par le passé, elle investit aussi sur le réseau demeuré propriété de SNCF Réseau : parties occitanes de Béziers-Neussargues et Nîmes-Clermont-Ferrand, Toulouse-Auch, étoile de Latour de Carol, etc…

Outre Occitanie, Nouvelle-Aquitaine, PACA et Corse investissent largement dans le réseau

 La région Nouvelle-Aquitaine participe largement aux rénovations ou réouvertures, telle l’interminable projet de rénovation de Limoges-Angoulême, la réouverture de la ligne Pau-Canfranc jusqu'à Bedous et ultérieurement au-delà, la réouverture au fret de Mont-de-Marsan-Aires-sur-l’Adour et des travaux de maintenance sur plusieurs autres lignes.

DSC04470Gare du Cailar, sur la ligne Nîmes-Le Grau-du-Roi, désormais simple arrêt de pleine voie. La région Occitanie investit régulièrement dans la rénovation de cette ligne aux potentiels périurbains, régionaux et touristiques considérables mais longtemps laissés à l'abandon. ©RDS 

 La région Provence-Alpes-Côte d’Azur vient de mettre la moitié des 310 M€ prévus dans le CPER, à parité avec l’Etat, pour rénover son infrastructure ferroviaire. Elle finance les travaux de rénovation de la ligne Digne-Nice, dont la voie antédiluvienne laisse progressivement place à une superstructure digne d’un pays européen tandis que les travaux de restauration du tunnel de Moriez, effondré voici deux ans, devraient être achevés en 2024.

 La Corse, enfin, poursuit avec ténacité la rénovation de son réseau à voie métrique et la collectivité travaille sur des projets d’extension progressive vers le sud de l’ancienne la ligne, fermée après la dernière guerre mondiale, qui reliait Bastia à Porto Vecchio.

La position d’Auvergne-Rhône-Alpes en rupture avec les investissements passés de Rhône-Alpes

 La singularité de la position de principe de la région Auvergne-Rhône-Alpes est d’autant plus surprenante que cette collectivité a cofinancé par le passé de considérables travaux d’infrastructure, en particulier la remarquable rénovation et modernisation de la ligne du Sillon alpin Montmélian-Grenoble et Moirans-Valence, avec électrification intégrale et redoublement partiel de sa section sud. Il convient d’y ajouter la construction d’un raccordement avec la LGV Méditerranée à Valence-TGV, malheureusement laissé en déshérence par SNCF Voyageurs qui n’y fait plus circuler aucun TGV entre le Midi et les Alpes.

 Les vœux recueillis par l’appel des douze organisations, et les signatures qu’ils auront recueillies, seront remis en septembre à Madame le préfet de région, Fabienne Buccio, et au président du conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez.

IMG_20230802_151546 (1)Rame TER à deux niveaux Saint-André-le-Gaz-Grenoble Universités Gières à l'approche de la gare de Voiron, sur l'axe Grenoble-Lyon. La région Auvergne-Rhône-Alpes et SNCF Réseau ont réalisé un effort remarquable pour obtenir un cadencement exact sur les grands axes, tels Grenoble-Lyon. Reste à entretenir les lignes de maillage, dont la clientèle nourrit pour partie les grands axes... ©RDS 

Publicité
Publicité
Commentaires
R
Puisque wauqiez pretends ne pas avoir à financer l infrastructure, mais seulement les services dessus (alors que ce qui est criticable n est pas tant que la Region paye, mais de ne pas pouvoir deliberer sur des recettes pour payer… et alors ensuite on aurait de vrai débat démocratiques, et pas des batailles d épiciers)…. Eh bien il pourrait alors decider d’innover et faire circuler des tergv annecy marseille, via le racco de valence. 2 ar par jour, et partager les frais avec paca (ca ne lui couterait pas gd chose vu que muselier le refuserait probablement) : 1 ar necessite une rame. Donc chaque region acquererait une rame
Répondre
B
Bonjour, c'est le Cailar (avec un i) entre Nîmes et Le Grau-du-roi. Le Caylar (avec Y) est dans l'Hérault. merci pour cet article !
Répondre
B
L' Etat va mettre 41 millions pour les Causses . Cf Transportrail
Répondre
B
Pas de travaux pour les petites lignes, à cause de la Région ? Pas de ZFE à Lyon, Grenoble, et Saint-Etienne !
Répondre
O
M.Wauqiez aime les postures de petit épicier, de celles qu'apprécie une large part de ses électeurs. Peut-être vrai que l'État en demande trop aux régions mais celui-ci est désormais largement impécunieux et avec d'autres priorités (Santé, Sécurité, Défense,...). Se pose aussi la question d'une décentralisation mal exécutée, mal ordonnée, où les politiques régionales sont soumises aux caprices et marottes des politiciens locaux, sans continuité ni réel sens de l'intérêt général. Bilan : La régionalisation n'aura servi trop souvent qu'à créer des bureaucraties et des maroquins pour politiciens en mal de lumière...Reste que AuRA retrouve sa position des années 80-95 concernant le rail ail : pas un kopeck.
Répondre
Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
  • Le chemin de fer est indispensable à toutes nos villes et ne doit pas être l'apanage de la seule région-capitale. Les lignes transversales, régionales et interrégionales doivent contribuer à une France multipolaire, équitable au plan social et territorial.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Newsletter
Publicité