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Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
3 décembre 2019

Bilan 2014-2020. A Grenoble, la gauche écologiste a oublié le tramway et négligé le train *

Raildusud entreprend d'analyser les bilans ferroviaires des mandatures qui s'achèvent dans quelques agglomérations du grand Sud-Est.

(*) Complété le 4 décembre par photographie en fin d'article.

A Grenoble, le bilan de la mandature 2014-2020 en matière de transport public ferroviaire est quasi-inexistant, dans un contexte financier difficile. Au cours de ces six années de gouvernement écologiste de la ville de Grenoble (Eric Piolle, EELV, maire), et de présidence socialiste de Grenoble Alpes Métropole (Christophe Ferrari, PS), entité de 445.000 habitants, qui dirige avec le département de l’Isère le Syndicat mixte des transports en commun, aucun projet d’extension du réseau de tramway n’aura été engagé, ni aucune réalisation sur le réseau ferré national. L’inauguration de la ligne E Fontanil-Louise-Michel (11,5km) en juin 2014, couronnait l’action des précédentes mandatures menées à Grenoble par le maire Michel Destot (PS) et pour l'intercommunalité par Didier Migaud (PS, 1995-2010) puis Marc Baïeto (PS, 2010-2014).

 L’inauguration le 21 décembre de cette année de l’extension de la ligne A d’Echirolles-Denis-Papin à Pont-de-Claix-L’Etoile ne concerne que 950 mètres de double voie (notre article du 1er octobre 2019) et son principe avait été arrêté à la fin de la précédente mandature. Notons enfin que la très démagogique promesse d’une gratuité des transports urbains est ressortie à l’occasion de cette campagne électorale.

En six années, une extension de… 950 mètres du réseau de tramways malgré de fortes attentes

 Certes la mandature qui s’achève a mené à bien cette extension de la ligne A sur moins d’un kilomètre. Mais elle s’est gardée de toute réalisation sur quatre autres axes, pourtant objets d’une forte demande (plan schématique du réseau à la fin de cet article).

1.       D’abord l’extension de la ligne E au sud de Louise-Michel, jusqu’à Pont-de-Claix ou jusqu’à Echirolles-Comboire, importante zone commerciale, qui fut un temps dans les cartons. Or aujourd’hui, sur un des axes urbains rectilignes les plus longs d’Europe (de Bastille à Pont-de-Claix), le réseau TAG impose une rupture de mode très pénalisante à Louise-Michel entre la ligne E du tramway et la ligne de bus structurante C2, avec attente en station en plein milieu (tramway) ou en accotement (bus) de la voirie principale. La station Louise-Michel n’est par ailleurs pas connectée aux lignes périphériques, l’importante ligne structurante C6 qui relie la presqu’île à Fontaine, Sassenage, Echirolles et Saint-Martin-d’Hères et la ligne 12 quasi-circulaire : toutes deux  passent à la station Stade-Lesdiguières, située à 500m au sud du terminus de la ligne E…

DSCN2113Nouveau terminus de la ligne A, à Pont-de-Claix-L'Etoile. Un plan de voie généreux (ci-dessus) mais aucune connection avec les TER de la ligne Grenoble-Veynes (ci-dessous), dont les trains ne sont pas près d'aller jusqu'à Vizille... (© RDS)

DSCN2112

 Signalons aussi l’incapacité des élus à obtenir la création d’un arrêt des trains de la ligne de Veynes (dont pourtant ils soutiennent activement la modernisation entravée par l’Etat) au terminus de Pont-de-Claix-L’Etoile de la ligne A (notre article du 2 octobre 2019), pourtant situé au contact direct du réseau ferré national.

2.       Deuxième axe en demande : le quart nord-ouest et la commune de Sassenage. Alors que la municipalité de cette commune de 11.500 habitants organisa une votation consultative sur une extension de la ligne A au-delà de Fontaine-La Poya, avec un résultat largement favorable, rien ne bouge dans ce secteur urbanisé en couloir entre les falaises du Vercors et l’Isère, situation pourtant idéale pour une desserte de type tramway. Il est actuellement desservi, avec rupture de mode à La Poya, par deux lignes de bus urbains (20 et 19) et une ligne de bus partiellement à la demande (50).

DSCN2331Une rame Citadis 402 de la ligne A vient de quitter la station Louis-Maisonnat pour se diriger vers Fontaine-La Poya. Pour aller au-delà, il faut changer et prendre en bus en attendant le long d'une voirie surchargée en face d'un centre commercial. © RDS

3.       Au nord-est, troisième axe laissé en déshérence alors qu’il est pourtant en pleine expansion aussi bien démographique qu’industrielle : la rive droite de l’Isère côté Grésivaudan, soit Meylan et ses au-delà.  Desservi jadis par le fameux tramway de Grenoble à Chapareillan, à la frontière de la Savoie, dont les gares demeurent en bord de route et les sections en site propre sont transformées en voiries ou chemins, ce secteur est l’objet d’une consultation sur un projet de bus à haut niveau de service (BHNS), sans que les élus ne proposent à la population une version tramway. Pourtant, la ligne C qui court au-delà de la mairie de Grenoble le long du boulevard Jean-Pain avant de s’orienter vers le Domaine Universitaire, constituerait une excellente amorce pour une ligne F poursuivie le long de l’autoroute urbaine D1090 jusqu’au centre commercial de la Plaine-Fleurie et au-delà vers Meylan et Montbonnot.

 La très active association d’usagers ADTC proteste contre ce projet ficelé d’avance : « La transformation d’une ligne de bus en ligne de BHNS entraîne une augmentationde la fréquentation de l’ordre 30 à 40%. En revanche, elle est de l’ordre de 130% lors de la transformation d’une ligne de bus ligne de tramway, autrement dit le tramway fait plus que doubler la fréquentation. Ces chiffres sont une moyenne établie sur une dizaine de cas d’après l'expertise TransMissions-TTK ». L'ADTC souligne aussi qu’une ligne de BHNS exige une emprise au sol plus importante qu’une ligne de tramway (la largeur des caisses du tramway de Grenoble est de 2,40m), l’autobus articulé n’étant pas un véhicule monotrace (dont tous les essieux suivent le même parcours au sol).

 Notons aussi qu’un bus articulé offre une capacité moindre (114 place pour l’Urbanway 18 d’Iveco) que le tramway court compact X05 d’Alstom (140 places) et évidemment que le Citadis 402 du même constructeur en service à Grenoble (300 places). La longévité d'un véhicule routier est considérablement inférieure à celle d'un véhicule ferroviaire. Enfin, l’autobus articulé viendra soit engorger un peu plus les voiries en ville, soit imposera une rupture de mode en première périphérie.

DSCN2091Une rame TFS rénovée assurant un service de la ligne C le long du boulevard Jean-Pain. Au fond, le pont sur l'Isère que pourrait franchir une ligne de tramway vers Meylan et Montbonnot après débranchement de la ligne C. © RDS

DSCN2077Face à l'hôtel de ville de Grenoble, un bus urbain articulé C1 vers Meylan Maupertuis, au côté d'une rame Citadis 402 de la ligne C. Le premier au gabarit large sur voie engorgée, l'autre, monotrace et au gabarit plus discret, sur voie protégée : la comparaison est édifiante. © RDS

DSCN2086Un bus Transisère 6020 va s'engager sur le boulevard Jean-Pain pour rejoindre Montbonnot, Saint-Ismier et Crolles, siège d'importantes industries technologiques. Le tramway le remplacerait avec un bonheur certain. © RDS

Un tramway permettrait en revanche de relier Montbonnot et Meylan à la gare de Grenoble Centre par les voies ferrées existantes via la ligne C jusqu’à Vallier-Libération, puis via la ligne E jusqu’à Alsace-Lorraine et enfin via la ligne A et B jusqu’à Gares. Cette solution paraît d’autant plus logique que toutes les jonctions existent, tant à Vallier-Libération qu’à Alsace-Lorraine, et qu’à Gares une voie en tiroir, inutilisée à ce jour, permettrait un retournement des rames. Le parcours en ville n’imposerait ainsi aucun investissement d’infrastructures.

DSCN2317Intersection cours Jean-Jaurès (voies de la ligne E)-avenue Alsace-Lorraine (voies des lignes A et B, sur lesquelles passe une rame Citadis 402). On distingue nettement au premier plan les deux voies de raccordement reliant gare et ligne E sud, qui pourraient servir à une ligne F Gare-Montbonnot par le boulevard Jean-Pain et la mairie de Grenoble. © RDS

4.       La région de Vizille est le dernier secteur ferroviairement abandonné par les édiles de cette mandature. Cette commune de 7.500 habitants, à l’entrée de l’étroite et très fréquentée vallée de la Romanche, était reliée par rail à la ligne Grenoble-Veynes à Jarrie-Vizille, par une voie des VFD (Voies ferrées du Dauphiné) de quelque 3km. Sa réactivation avait été évoquée mais le projet d’un RER empruntant la ligne de Veynes de puis Grenoble et bifurquant jusqu’à Vizille est à l’évidence au point mort.

 Pourtant, chaque soir, sur le cours Jean-Jaurès à Grenoble, les bus de la ligne Express 3 Grenoble-Gare-Vizille (33 allers-retours quotidiens) sont englués dans des embouteillages interminables et ils effectuent le parcours en 45 minutes. Parallèlement, le TER Grenoble-Veynes effectue le parcours Grenoble-Jarrie-Vizille (à 3km de Vizille) en 15mn.

La fusion des autorités organisatrices de toute l’aire grenobloise pourrait relancer le ferroviaire

Le bilan ferroviaire de cette mandature ne serait toutefois pas complet sans préciser que le 1er janvier 2020, le Syndicat Mixte des Mobilités de l’Aire Grenobloise (SMMAG), Autorité Organisatrice de la Mobilité sur les territoires du Grésivaudan, du Voironnais et de l’agglomération Grenobloise remplacera les autorité organisatrices préexistantes. Il a vocation d’ici 2022 à s’étendre aux 8 autres territoires de la région grenobloise (Bièvre Est, Bièvre Isère, Cœur de Chartreuse, Matheysine, Oisans, Saint-Marcellin Vercors Isère, Trièves et Vercors). On peut espérer que, dans cette région aux fortes structures géographiques (larges vallées et hautes montagnes), ce nouvel organisme misera fortement sur la technique ferroviaire, parfaitement adaptée au contexte naturel et démographique.

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Plan schématique du réseau métropolitain grenoblois :

 Metropole_grenobloise

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Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
  • Le chemin de fer est indispensable à toutes nos villes et ne doit pas être l'apanage de la seule région-capitale. Les lignes transversales, régionales et interrégionales doivent contribuer à une France multipolaire, équitable au plan social et territorial.
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