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Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
7 mai 2021

Toulon, Sète, Port-la-Nouvelle : ces trois ports méditerranéens misent sur le ferroviaire

 Les ports français de la Méditerranée reprennent le chemin du rail. Si celui de Marseille y est toujours resté connecté, le port commercial de Toulon, au Brégaillon, y revient après des années d’absence de connexion directe mer-fer. Celui de Sète développe son faisceau au contact de ses bassins dans la perspective, en particulier, d’une autoroute ferroviaire vers Calais. Celui de Port-La- Nouvelle, spécialisé dans le vrac liquide et solide, continue d’en faire un outil central de son activité.

Toulon, réactive l’antenne ferroviaire desservant son port commercial du Brégaillon, après 12 ans d'interruption

 Les bassins commerciaux de la préfecture du Var, partie des Ports rade de Toulon, sont de nouveau raccordés au réseau ferroviaire national depuis le 23 avril, date de la première circulation d’essai en conditions réelles. La dernière circulation ferroviaire fret vers les bassins de commerce du Brégaillon,  sur la façade ouest de la rade, dataient de 2009. Depuis, la voie unique était à l’abandon, un pont-rail ayant même été endommagé par une circulation routière.

 Cette antenne abandonnée depuis plus d’une décennie bifurque de l’axe Marseille-Nice à proximité des bâtiments de la gare de La Seyne-Sanary-sur-Mer, comme l’antenne vers le port militaire. Elle passe à l’arrière du parvis d’entrée du bâtiment voyageurs avant de franchir plusieurs axes routiers importants, particulièrement les avenues d’Estienne d’Orves et de la Première Armée française-Rhin et Danube. C’est après avoir franchi cette dernière qu’elle entre dans la zone portuaire de Brégaillon.

PortCirculation d'essai au port toulonnais du Brégaillon, le 23 avril. RDT13 asurera les mouvements avec Sferis, filiale de SNCF Réseau. La réactivation de l'antenne s'inscrit dans une volonté de report modal portée tant par le port que la CCI, la région, le département, la métropole et l'Etat. (Doc. Ports Rade de Toulon) 

 Les travaux de rétablissement ont duré deux années, pilotés par la Chambre de commerce et d’industrie du Var, gestionnaire du site du port de commerce et SNCF Réseau, avec l’entreprise Colas Rail (groupe Bouygues). Leur montant s’élève à 3,7 millions d’euros pour une antenne d’environ 1.500 m, plus les voies du faisceau. Il a fallu rétablir les franchissements routiers et changer le tablier métallique d’un pont-rail qui avait été endommagé par un poids-lourd.

 La circulation d’essai du 23 avril a été réalisée avec l’appui de l’exploitant ferroviaire RDT13, mandataire du groupement RDT13-Sferis, gestionnaire de l’installation terminale embranchée (ITE), et SNCF Réseau. Sferis est une filiale de SNCF Réseau  pour les travaux de maintenance ferroviaire, de sécurité et de gestion des circulations. La manutention des conteneurs maritimes vers les wagons porte-conteneurs a été effectuée par la société CGMV, manutentionnaire sur le terminal mer-fer-route.

 Rappelons que RDT13, établissement public industriel et commercial, dépend depuis 2017 de la Métropole d’Aix Marseille Provence, après son transfert depuis le département des Bouches-du-Rhône. Son ancienne activité ferroviaire voyageurs dans le département a été transférée sur route avec le service voyageurs actuellement baptisé Cars13. Elle conserve de son ancien et vaste réseau départemental l’exploitation de la ligne Pas-des-Lanciers-La Mède (13,5 km).

 Mais son activité ferroviaire s’est développée depuis la levée du monopole sur le fret et l’obtention de son certificat d’Opérateur ferroviaire de proximité (OFP). Elle assure ainsi la traction sur le faisceau du port fluvial d’Arles, le transport des ordures ménagères de Marseille vers l’incinérateur de Fos-sur-mer, la traction ferroviaire interne du site de transport combiné Clésud à Miramas. Elle assure aussi la maintenance d’infrastructures ferroviaires pour le Grand Port Maritime de Marseille et pour Clésud. Début 2023, RDT13 opèrera une « ligne publique de messageries » sur la zone de la métropole d’Aix Marseille Provence, sous la forme d’une navette à haute fréquence desservant Clésud, Fos, Saint-Martin-de-Crau destinée à reporter sur rail des circulations routières.

PortVue d'ensemble de l'installation terminale embanchée sur le port du Brégaillon. Les travaux de reconstitution de la superstructure ont été réalisés par Colas Rail, du groupe Bouygues. (Doc. Ports Rade de Toulon) 

Le budget de 3,7 M€ pour le rétablissement de la liaison ferroviaire vers le port commercial de Toulon a été financé à parts égales (20 %) par la CCI du Var, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, le département du Var, l’Etat et la métropole Toulon Provence Méditerranée. Une gestion de la maintenance assistée par ordinateur est installée pour l’entretien de l’antenne.

Sète crée un nouveau terminal fer-mer de cinq voies dans la perspective et prépare une autoroute ferroviaire avec Calais

 A Sète, on s’affaire pour achever la construction du nouveau terminal fer-mer qui devrait être opérationnel dès septembre. Le Port de Sète Sud de France entend y faire transiter à terme 40.000 remorques ou conteneurs par an afin d’accompagner, en particulier, l’accroissement du trafic vers la Turquie.

 Ce projet s’inscrit dans la politique de l’Etat français de créer une autoroute ferroviaire Calais-Sète qui nécessite la construction d’un terminal spécifique à Sète. Il sera par ailleurs l’origine-destination de deux allers-retours hebdomadaires vers Gennevilliers, zone portuaire et commerciale de Paris.

DSCN0202Depuis le mont Saint-Clair, vue générale de la gare de Sète voyageurs, à l'origine point de contact entre la compagnie du Midi et le PLM. Plus au sud, les faisceaux marchandises étaient partagés entre l'un propriété du Midi, l'autre du PLM, d'où l'importance des emprises ferroviaires. ©RDS

 Le nouveau terminal, d’une surface de 5 hectares, sera constitué de quatre voies de 400 mètres de longueur chacune, dédiées à la manutention des conteneurs et remorques. Dotées d’engins de levage, elles seront à même de traiter trois trains par jour, soit environ 40.000 caisses par an, soit la moitié des volumes échangés avec la Turquie. Une cinquième voie devrait être posée d’ici 2022, dotée d’un système de transfert sans levage de type Modalohr ou Cargo Beamer, qui permettent de charger les remorques de poids-lourds horizontalement, sur un même niveau. Le système Modalohr, bien connu en France, permet aux camions d’entrer latéralement sur le wagon grâce à son châssis pivotant, quel que soit le type de remorque. Le concept d’autoroute ferroviaire admet indifféremment le transbordement par portique ou par poussage horizontal.

 Un appel à projet a été lancé par le ministère des Transports, avec date-butoir de dépôt des candidatures le 16 mai pour mise en service en 2022. Un accompagnement financier de l’Etat est envisagé, avec des taxes et un péage ferroviaire gratuits dans un premier temps, réduits ensuite temporairement à 50 % de leur valeur. « Une autoroute ferroviaire créée, c’est 20 000 camions en moins », fait valoir le ministère.

PortAperçu d'une partie du port de Sète. Le nouveau faisceau mer-fer servira à l'autoroute ferroviaire Sète-Calais, mais aussi à d'autres circulations. (Doc. Wikipedia/Lundeux)

L’autoroute ferroviaire Sète-Calais affichera une distance d’environ 1.300 km car elle devrait transiter par Lyon, Dijon, Metz, Charleville-Mézières, Valenciennes et Lille afin d’éviter les réseaux saturés d’Ile- de-France via un itinéraire certes rallongé d’une centaine de kilomètres mais entièrement électrifié. Le temps de parcours devrait s’élever à 20 heures contre 36 heures par la route.

Notons enfin concernant le port de Sète que l’importation depuis la Turquie de clinker, constituant du ciment, est en constante croissance avec un trafic susceptible d’atteindre 400.000 tonnes par an d’ici 2024. Sa réexpédition par Cem’In Log  vers son usine de Portes-lès-Valence passe par voie fluviale (canal du Rhône à Sète et Rhône) et par voie ferrée vers la même usine et celle de Chalons-sur-Saône, ainsi que le notait Raildusud dans un article du 9 décembre dernier.

Port-la-Nouvelle dessert tous ses bassins par réseau ferré géré par Sferis avec RDT13 comme tractionnaire

 A Port-la-Nouvelle, l’extension des bassins est en cours, alors que tous les terminaux sont actuellement desservis par des voies ferrées.  Situé, comme ceux de Sète et de Marseille, sur le corridor fret européen n°6 (Espagne, France, Italie, Slovénie, Hongrie), « Port-la-Nouvelle-Sud de France » est le deuxième port pétrolier français après celui de Marseille et traite environ 2 millions de tonnes par an. Outre les marchandises traditionnelles, il traite d’importantes quantités de vrac liquide (produits pétroliers) ou secs (céréales), pour lesquels le rail est particulièrement adapté. Comme celui de Sète, il est propriété de la région Occitanie.

PortVue du bassin de Port-la-Nouvelle et d'un de ses importants silos. Ce port, propriété de la région Occitanie comme celui de Sète et plusieurs autres, voit transiter d'importants trafic de vrac liquide ou sec, pour lequel le rail est particulièrement adapté. (Doc. Wikipedia/Lundeux)

 Le gestionnaire du port, une société d’économie mixte type SEMOP, insiste sur le fait que tous les terminaux sont embranchés fer. Le port est doté d’une liaison très courte vers l’axe ferroviaire principal du réseau ferré national, offrant une gestion rapide des trains entre la zone portuaire et les voies principales.  La région Occitanie a mis en place une nouvelle gestion du réseau ferré portuaire, appuyée par de nouveaux investissements. En tant qu’autorité portuaire, elle devenue propriétaire des voies ferrées portuaires depuis 2016. En 2018, elle a délégué la gestion de ce réseau jusqu’en 2023 à un exploitant en charge de gérer les circulations ferroviaires et d’assurer la maintenance des voies. Sferis est mandataire pour un groupe réunissant, outre cette société privée filiale de SNCF Réseau, RDT13, ETF  (groupe Vinci) et SNCF Réseau.

IMG_20200702_141428Ci-dessus : rame de vrac sec au passage à Montpellier Saint-Roch. L'axe languedocien est un maillon-clé du corridor fret n°6 déterminé par la Commission européenne, qui relie l'Espagne à la Hongrie (ci-dessous, cliquer pour plus de détails). ©RDS et carte SNCF Réseau.

Corridor_Europe_V0-3_FR_1 Cette desserte ferroviaire sera d’autant plus utile que le port de Port-la-Nouvelle va être doté d’une nouvelle infrastructure en eau profonde, en cours de construction. « Elle va permettre d’opérer de plus grands navires, d’augmenter les zones de manutention et de stockage, de spécialiser les terminaux et de proposer des espaces logistiques optimisés », indique le gestionnaire du port. Le port accueillera de nouvelles activités, notamment les industries liées à l’éolien en mer (au cours de cette année), à la maintenance des parcs offshore, à la production d’hydrogène vert et au stockage d’énergies renouvelables.

 De nouveaux terminaux seront créés (vracs liquides et secs) ainsi qu’une zone industrielle. Le port passera de 60 à 230 hectares en valorisant son patrimoine foncier. Il aménagera deux darses au sein d’un plan d’eau nouvellement créé avec une hauteur d’eau portée de 8,60 m à 16 m permettant l’accueil de navires jusqu’à 80.000 tonnes de port en lourd à l’horizon 2025.

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Commentaires
B
Votre carte démontre l' absolue nécessité de mettre l' axe "vallée du Doubs" (Dijon - Mulhouse) au gabarit B+, pour le port de Bâle.
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Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
  • Le chemin de fer est indispensable à toutes nos villes et ne doit pas être l'apanage de la seule région-capitale. Les lignes transversales, régionales et interrégionales doivent contribuer à une France multipolaire, équitable au plan social et territorial.
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