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Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
13 décembre 2024

Rail et stations balnéaires en Méditerranée – 2 : l'Occitanie peine à desservir son littoral par le rail

Si, à l’exception notable de la Costa Brava, le rail dessert très largement et magnifiquement la côte catalane, il n’en va pas de même au nord des Pyrénées, pour la côte d’Occitanie. Nous exposons ci-après pour cette région les cas de de dessertes proches, souvent géographiquement limitées, souvent trop peu fréquentes ou sous-exploitées, d'autres disparues. En Languedoc, la ligne improprement dite du littoral (Tarascon-Cerbère), ne dessert en fait directement les cités balnéaires que sur de courtes sections: Elen Cerbère et Agde-Sète. Elle en est éloignée sur le reste de l'itinéraire.

 Après la Catalogne et l’Occitanie, Raildusud traitera de Provence-Alpes-Côte-d’Azur dans un troisième et dernier article.

 Côte Vermeil : le rail en surplomb du littoral.- En Occitanie, l’exemple le plus présentable de desserte ferroviaire des villes côtières est celui de la côte Vermeil entre Cerbère et Elne. Cette section de l’axe Narbonne - Port-Bou longe le littoral en surplomb et dessert les cités balnéaires, touristiques et historiques, du sud au nord : Banyuls-sur-Mer, Port-Vendres, Collioure. Même si les gares sont assez éloignées des cités côtières en raison de l’élévation de la ligne, les TER sont relativement fréquents, à raison de 11 dessertes en semaine et 9 les dimanches et fêtes. Mais l’amplitude horaire est étroite, de 7 h 51 à 20 h 55 au départ de Perpignan vers Cerbère, excluant tout déplacement vespéral tardif (retour de spectacle) ou très matutinal. Point incompréhensible : les correspondances à Port-Bou sont ridiculement réduites à trois par jour, en semaine.

Vue générale de Port-Vendres. La ligne ferroviaire passe à l'arrière de la ville.  La côte Vermeil est sans doute la plus finement desservie par le rail en Occitanie,. (Doc. Tourisme-Occitanie)

 Perpignan-Canet Plage : après le tramway, la route.- Sur cette ligne de 13 km, un tramway a circulé de 1900 à 1954, très fréquenté les dimanches. Il fut remplacé par une ligne d’autocars pour permettre l’élargissement de la route départementale, sur exigence du conseil général, la ligne étant établie en acotement. L’autocar circule au milieu des voitures pour desservir Canet-Plage, qui compte 12.600 habitants en résidence permanente, mais plus de 9.000 résidences touristiques soit plus que les résidences principales, 2.400 places de camping, plus d’un millier de places en chambres touristiques et plus de 500 chambres d’hôtel.

 Littoral audois : Leucate et Port-la-Nouvelle.- Si la section Perpignan-Narbonne du même axe se rapproche de la mer – voire traverse de grands étangs -, les gares d’accès direct au littoral sont peu nombreuses : Leucate-sur-Mer et Port-la-Nouvelle. La gare de Gruissan-Tournebelle, éloignée d’une dizaine de kilomètres de la côte, impose un parcours d’approche. Gruissan compte 5.200 habitants et environ 720 places de camping. La section est desservie par 19 TER par jour et par sens en semaine, avec une amplitude horaire au départ de Narbonne de 7 h 06 à 22 h 07, plus attractive, mais de 5 h 32 à 20 h 10 au départ de Perpignan, ce qui est nettement moins convaincant.

 Notons que La Nouvelle était aussi desservie depuis l’intérieur (Portel, Thézan, Lézignan…, 51,8 km) par la « ligne des Corbières » des tramways de l’Aude de 1902 à 1932.

 Littoral biterrois et agatois : Valras en bus, Agde pôle principal.- Une ligne de tramway électrique de 13 km relia Béziers à Valras-Plage, qui compte aujourd’hui 4.200 habitants à l’année. Elle fut exploitée de 1901 à 1949. Depuis, les liaisons sont routières. Plus au nord, la gare d’Agde de la ligne Tarascon-Sète-Narbonne donne accès au Cap d’Agde moyennant correspondance routière. Si les TER sont fréquents et quasiment cadencés, on notera que les dessertes grandes lignes y sont devenues rares avec, hors haute saison d’été, 4 TGV et 2 Intercités par jour et par sens. Si la commune d’Agde compte 30.000 habitants (80.000 habitants dans son intercommunalité), sa population estivale atteint 200.000 habitants, principalement grâce à la station balnéaire du Cap d’Agde, située à 6 km de la gare et reliée par des services d’autocars urbains.

Le fort de Brescou, au large du Cap d'Agde. Agde, port d'origine grecque à l'embouchure du fleuve Hérault descendu du lointain massif de l'Aigoual, est à la fois un bijou patrimonial, culturel et son cap un pôle touristique de dimension européenne depuis les années 1970. (Doc. Tourisme-Occitanie.com)

Littoral sétois : Marseillan ignorée, Sète pôle principal.- Tout près d’Agde mais de l’autre côté du cap, la station de Marseillan-Plage n’est desservie par TER que 5 fois par jour et par sens (horaires jusqu’au 4 juillet 2025) et une seule fois par jour les samedis, dimanches et fêtes (!), alors que la halte ferroviaire est proche des plages contrairement à la gare d’Agde qui impose un relais pour atteindre le Cap d’Agde. L’alternative par autobus le long du cordon littoral Cap d’Agde-Sète est soumise aux engorgements routiers. Gageons que la mise en service de la ligne nouvelle Montpellier-Béziers dégagera quelques sillons TER pour desservir cette gare des plages, notablement délaissée.

 C’est bien sûr Sète qui revêt le rôle de gare principale de cette portion du littoral, avec desserte TER d’une trentaine de fréquences par sens (quelques-unes limitées à Sète-Montpellier ou Lunel). Le port, sa plage rocheuse le long de l’amorce de sa digue, et la côte sableuse côté sud sont accessibles par le réseau urbain d’autobus. Ce dernier qui touche jusqu’à Frontignan, gare bien desservie elle aussi mais éloignée des plages et résidences côtières.

Littoral montpelliérain : le rail grand absent.- Contrairement à ce que l’on croit – ou affirme souvent pour des raisons promotionnelles -, Montpellier n’est aucunement une ville côtière. Le littoral est situé à 11,6 km du centre historique, si l’on se réfère à la longueur de la ligne de chemin de fer départemental de Montpellier Esplanade à Palavas-les-Flots. Cette dernière a été stupidement supprimée par le département, son propriétaire, en 1968 alors qu’elle était bénéficiaire et extrêmement fréquentée surtout l’été et les fins de semaines. Elle avait été ouverte en 1872.

 Au sud-ouest de Montpellier, la grande ligne historique reste derrière les étangs, loin des plages (Frontignan, Vic-Mireval, Villeneuve-lès-Maguelone). Au nord-est, elle s'en éloigne plus encore.

 La métropole de Montpellier, autorité organisatrice des transports, compte 508.000 habitants et sa commune-centre un peu plus de 300.000. Pour des raisons politiques, le territoire de la métropole ne dispose que d’une courte section du littoral non urbanisée, par la commune de Villeneuve-lès-Maguelone. Lattes et Pérols n’ont d’ouverture que sur les étangs. De plus, la commune de Montpellier est isolée du littoral par une série d’obstacles humains et naturels : l’autoroute A 709, l’autoroute A9, la voie mixte fret-grande vitesse CNM et son vaste faisceau de la gare Sud-de-France, l’aéroport de Fréjorgues, de vastes zones commerciales et bien sûr les étangs, qui ne laissent que d’étroits passages pour rejoindre le cordon littoral.

Station Boirargues sur la ligne 3 du tramway de Montpellier. La rame Citadis 402 se dirige vers Pérols Etang de l'Or, son terminus. Une desserte du cordon littoral de Carnon, La Grande-Motte puis Le Grau-du-Roi paraît s'imposer. D'autant que la circulation automobile sur la route desservant directement les plages est désormais limitée à l'accès aux parkings, le flux de transit circulant sur la route à quatre voies côté étang. ©RDS 

 Malgré cette situation défavorable, plus aucun lien ferroviaire ne relie Montpellier à la mer depuis la suppression de la ligne de Palavas-les-Flots. La ligne 3 du tramway s’arrête, à Pérols-Etang de l’Or, à environ 2 km des plages, imposant une marche à pied sur un itinéraire pollué par les automobiles ou un relais par autobus. Le lot de consolation pourrait être la gare Sud-de-France, plus proche du littoral que la gare Saint-Roch. Mais elle n’est desservie par aucun TER et la prochaine extension de la ligne 1 du tramway est orientée vers le nord.

 Le grand projet serait bien sûr de prolonger la ligne 3 du tramway (au généreux gabarit de 2,65 m de largueur, égal à celui du train-tram de l’Ouest lyonnais) de Pérols-Etang de l’Or vers La Grande-Motte et Le Grau-du-Roi à l’est, bouclant ainsi un service ferroviaire fréquent et à grande capacité, hors du flux automobile, en rejoignant la ligne Nîmes-Le Grau-du-Roi.

 Or aucun projet n’est porté en ce sens par aucune autorité organisatrice des transports, que ce soit la région Occitanie ou les intercommunalités concernées.

 Par ailleurs, la reconstruction d’un lien ferroviaire avec Palavas centre pourrait s’imaginer par emprunt de l’ancienne plate-forme de la ligne départementale à partir des abords de la station La Rauze de la ligne 4 qui a récupéré sur quelque 400 m l’axe du « train de Palavas ».

 Le rail est donc le grand absent de la côte du pays montpelliérain et devrait le rester longtemps.

Le littoral gardois : une ligne d’accès direct, mais sous-exploitée.- La seule ligne ferroviaire de l’ancien Languedoc-Roussillon principalement dédiée à l’accès à un port et aux plages est celle de Nîmes Saint-Césaire au Grau-du-Roi, station donnant accès à Port-Camargue. En cours de restauration partielle pour 10 millions d’euros (lire notre article du 13 novembre*), cette ligne fut, au cours des années 1970-1980, exploitée par fer uniquement l’été. Le reste de l’année les circulations voyageurs étaient transférées sur route, nonobstant l’affluence touristique d’origine régionale les fins de semaines de printemps, d’automne voire d’hiver et les dessertes périurbaines (Vauvert…). Elle est à ce jour exploitée par fer a minima hors saison, l’offre étant fortement augmentée l’été.

Rame XGC en gare terminus du Grau-du-Roi. Jusqu'à présent, le rail reste marginal tout au long de l'année, à l'exception de la haute saison d'été, malgré le remarquable patrimoine que représente la ligne. ©RDS 

 Cette ligne pourrait servir à l’accès à la mer d’une importante clientèle venue des régions lyonnaises et alpines, voire au-delà, tout en servant de desserte cadencée pour la banlieue sud de l’agglomération nîmoise et en offrant un loisir balnéaire aux habitants des Cévennes et de Nîmes. Il est probable qu’en Catalogne, au vu de ce qui a été exposé dans notre précédent article, elle serait depuis longtemps électrifiée, équipée de gares modernes et cadencée.

 La prolongation de la ligne 3 du tramway de Montpellier jusqu’au Grau-du-Roi par La Grande-Motte permettrait un accès facile à cette dernière (dont la surface est considérable) depuis Nîmes moyennant une brève correspondance au Grau-du-Roi. Mais, ainsi qu’exposé plus haut, aucun projet, fût-il à l’état d’ébauche, n’envisage ni l’un (une modernisation de rupture de la ligne SNCF Réseau) ni l’autre (une extension de la ligne 3 sur le cordon littoral). Décrochage français…

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(*) Lien vers notre récent article consacré à la rénovation de la ligne du Grau-du-Roi :

https://raildusud.canalblog.com/2024/11/renovation-de-nimes-le-grau-du-roi.html

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Prochain article : Rail et stations balnéaires en Méditerranée – 3 : en Provence-Alpes-Côte-d’Azur, de beaux atouts… mais de regrettables abandons

 

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Commentaires
B
Perpignan - Le Canet Plage : encore de la corruption "anti-rail/pro-route" qui a fait disparaitre une ligne "ferrée", au profit d' autocars . La France est vraiment spécialiste de ça !
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U
Bonjour <br /> Petite digression. <br /> Les blogs cousins transportrail et transportparis ont disparu des radars. <br /> Qui sait ce qu'ils sont devenus ? Et pourquoi ?<br /> Merci pour vos lumières !
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B
Topic suivant : une réponse partielle.
J
A quelques exceptions près, notre pays est incapable d'organiser convenablement ses transports "terrestres".<br /> En voyageant un peu, ce que nos voisins arrivent à faire est "incompréhensible" pour nos "décideurs".<br /> Je ne pense pas que les Suisses soient des gens à jeter l'argent par les fenêtres (ce serait plutôt le contraire");<br /> Et pourtant c'est l'exemple à suivre surtout dans la complémentarité des transports.<br /> Trains fédéraux, trains privés, bus "postaux", il est possible de voyager dans ce pays sans aucun moyen de transport individuel (hormis le vélo...).<br /> Cela existe dans d'autres pays d'Europe, l'Allemagne, l'Autriche, même l'Italie...etc !<br /> Chez nous, les différents modes se font concurrence et pas toujours loyalement...<br /> <br /> Donc le problème n'est pas forcément le nombre d'arrêt ou leur proximité avec un lieu de résidence mais plutôt une fréquence et une complémentarité qui sont défaillantes.<br /> <br /> Il y a bien longtemps, l'indicateur Chaix donnait pour chaque gare dans ses pages "réseaux divers" le ou les correspondances possibles avec le nom de l'entreprise "privées" et son numéro de téléphone.<br /> (parfois un simple taxi chargé de l'acheminement du courrier "postal" vers une bourgade du coin, dérogation accordée aux chemins de fer par le ministère des P&T, mon dieu c'est si loin !!!) <br /> A l'erre du numérique, c'est un véritable chemin de croix pour s'y retrouver et organiser son voyage (hors TGV). <br /> Nous sommes dans le monde du "chacun pour soit et .... pour tous", autant dire personne.<br /> Cherchez l'erreur !
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S
Je plussoie !
D
La liaison ferrée entre Montpellier et la mer est une évidence. Mais on retombe une fois de plus dans la spécificité du clochemerle français, où des élus locaux refusent la mise en place d'infrastructures de transport performantes qui menaceraient leur petite influence locale (ça n'est malheureusement pas restreint au cas Montpellier Palavas/La Grande Motte). On n'a pas eu peur de larder tous les environs (y compris la frêle bande côtière entre mer et étangs de routes à 2x2 voies qui pourrissent la vie de tous les riverains qu'ils soient de droite ou de gauche ,et dont il a été montré maintes fois que ce n'est pas la solution. En effet ce genre de route finit toujours sur des échangeurs saturés; donc sauf entre 23h et 4h du matin, un service de TCSP serait de toute façon aussi performant. <br /> Pareil pour le Grau du Roi, Les routes à 2x2 voies pullulent tout autour mais on est incapable de moderniser un tant soit peu la ligne ferroviaire afin de permettre un cadencement horaire (pour gratter les quelques minutes permettant un demi tour en 1h et garantir un cadencement horaire avec 2 rames, il faudrait au delà d'un relèvement des VL automatiser la signalisation afin de gagner sur les temps d'arrêt à Vauvert. et au prix d'un km de route à 2x2 voies, on trouverait vite les moyens.
Répondre
S
Je plussoie aussi !
Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
  • Le chemin de fer est indispensable à toutes nos villes et ne doit pas être l'apanage de la seule région-capitale. Les lignes transversales, régionales et interrégionales doivent contribuer à une France multipolaire, équitable au plan social et territorial.
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