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Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
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18 novembre 2024

SERM : l'offensive d'"Objectif RER métropolitains" pour faire avancer et financer les 24 projets labellisés

En début d’été, durant les derniers jours du gouvernement Attal et de ses ministres Christophe Béchu (Transition écologique et Cohésion des territoires) et Patrice Vergriete (ministre délégué aux Transports), vingt-quatre projets de Services express régionaux métropolitains (SERM) ont été labellisés. Si la labellisation a été soutenue par quasiment tous les partis du spectre politique, la crise financière traversée par la France et la concentration massive des investissements publics en matière de transport ferroviaire sur l’Ile-de-France ou pour l’Ile-de-France laissent craindre de nouveaux reculs. L’association Objectif RER métropolitains, qui réunit spécialistes, associations et collectivités, entend porter la voix des aires métropolitaines hors Ile-de-France dans le débat qui s’ouvre.

Les SERM, des RER régionaux édulcorés ?

 D’ores et déjà, ces SERM ont pris la place du concept de « RER » régionaux annoncés par le président de la République Emmanuel Macron l’année précédente. Ils en sont une forme édulcorée puisqu’ils incluent toutes les formes de transport alternatives à l’autosolisme : ferroviaires (TER, tramways) mais aussi routières (autobus plus ou moins améliorés, autopartage, vélo). Imagine-t-on en Ile-de-France voir labelliser « RER » des pistes cyclables, des autobus sur voie réservée et des aires de covoiturage ?

 Le nouveau ministre des Transports,  François Durovray, a d’ailleurs inauguré son mandat de façon routièrement tonitruante en marquant comme première proposition supposément disruptive, celle des « autocars express ». Si ce type de solution est légitime sur certains marchés de niche, elle n’est ni généralisable ni substituable au mode ferroviaire (grande capacité, site propre, rentabilité croissante), ni nouvelle : Lyon connaît depuis une vingtaine d’années ses bus express Carsdurhône (2Ex Lyon-Chazelles, le plus fréquent), Grenoble ses bus express Voiron-Crolles contournant l’agglomération centrale, etc…

Rame ZGC à l'entrée de la gare de Montpellier Saint-Roch, sur la ligne Tarascon-Sète. L'aire métropolitaine de Montpellier, privée de son historique et abondante étoile ferroviaire et dont il ne demeure plus que l'axe littoral, est l'exemple type de l'agglomération qui se dirige vers un SERM très majoritairement routier. D'autant que ses ressources propres sont amputées de plus de 40 millions d'euros par an en raison de la politique de gratuité imposée par ses élus, et qu'une partie importante de ses TGV, dirigés sur la gare de Sud-de-France, ne donne aucune correspondance aux TER. ©RDS 

 Or la dimension ferroviaire paraît incontournable. M. Durovray a dû en convenir après la légitime émotion causée par la première prise de parole de ce spécialiste ès-autocars express. Les dossiers de SERM qui ont été présentés par les régions, intercommunalités et autorités publiques des mobilités l’ont été sans distinction d’orientations politiques avec une insistance sur l’ossature ferroviaire des réseaux. Les besoins sont considérables, dans une France dont les grandes aires métropolitains sont notoirement sous-équipées en matière de transport ferroviaire par rapport à leurs homologues allemandes, suisses, espagnoles, voire italiennes.

Aire urbaine de Lyon, aire urbaine de Barcelone : le contraste

 Il suffit de comparer l’équipement de l’aire urbaine constituée par la métropole de Lyon, le Nouveau Rhône, Saint-Etienne métropole, le nord-Isère et l’ouest de l’Ain, - 3 millions d’habitants -, et la province de Barcelone – 5,7 millions d’habitants – pour constater que la différence proportionnelle d’offre de transport public ferroviaire n’est pas de 1 à 2. Le seul métro de Barcelone, qui dessert essentiellement la ville centre (1,66 million d’habitants), compte 12 lignes totalisant 166 km quand celui de Lyon, qui dessert de même essentiellement la ville centre et Villeurbanne (680.000 habitants, soit un peu moins de la moitié) ne compte que 4 lignes de métro totalisant 34,45 km.

 Les trains de banlieue (Rodalies, sortes de RER) de la région de Barcelone totalisent 16 lignes pour 615 km tandis que les TER de proximité autour de Lyon (limites : Vienne-Villefranche-sur-Saône, Saint-Etienne-Ambérieu, Lyon-Bourg, Lyon-Tarare, Lyon-Bourgoin-La Tour-du-Pin, Ouest Lyonnais) totalisent 8 lignes pour 420 km, avec des fréquences et amplitudes horaires qui ne peuvent rivaliser avec celles de la plupart des lignes des Rodalies catalanes. La ligne R1 L’Hospitalet de Llobregat-Maçanet offre des départs de 5 h 48 à 23 h 33, avec une fréquence de l’ordre d’un train toutes les 10 mn sur sa partie sud (jusqu’à Mataro), toutes les 30 mn jusqu’à Blanes voire jusqu’à Maçanet hors heures creuses.

Carte synthétique des services Rodalies/Cercanias de l'aire métropolitaine de Barcelone. Celle de Lyon, dotée de moins de lignes TER de proximité et aux fréquences et amplitudes inférieures, ne dispose pas d'une carte aussi informative. ©RDS  

Autour de Lyon, l’axe Lyon-Perrache/Part-Dieu-Saint-Etienne-Firminy, réputé le plus chargé de France, offre des départs de Lyon de 5 h 20 à 22 h 20, avec un TER toutes les 30 mn de Part-Dieu à Châteaucreux (origine Ambérieu) mais toutes les heures en soirée. On compte aussi un TER toutes les 30 mn en heures de pointe, toutes les heures en heures normales de Perrache à Châteaucreux (terminus Firminy). La dissociation de ces deux lignes aux extrémités et sur le Rhône aval, la forte différence des temps de parcours Saint-Etienne-Lyon (46 mn contre 55 mn) limite leur synergie.

Reconnecter les populations expulsées avec les villes centre

 La mobilisation d’ampleur des régions et intercommunalités « démontre qu'une réponse est possible, dans le domaine des mobilités, à l'immense attente de service public dans les territoires périphériques, qui s'est exprimée dans les urnes en juin ». Car s’il s’agit bien se services « métropolitains », leur mission est de reconnecter les populations périphériques, expulsées des centres métropolitains en raison de l’inaccessibilité des prix des logements, avec l’activité centrale. Si l’affichage est souvent « climatique », la raison profonde est sociologique certainement, énergétique probablement, politique assurément.

 Si les vingt-quatre projets labellisés sont des démarches complètes à moyen terme, incluant en particulier d’importants travaux d’infrastructure ferroviaire, « leurs premiers pas n'en sont que plus importants pour obtenir des premiers résultats rapidement et en garantir la trajectoire », juge le Objectif RER métropolitains. Le collectif a donc, dans la foulée de la labellisation proposé dès fin juillet, dans une lettre ouverte « trois mesures urgentes qui permettraient dans les dix-huit mois de premières mesures d'offre, de sécuriser financièrement les projets en investissement et en exploitation, et de les mettre en débat avec le plus grand nombre ».

Carte synthétique des projets de SERM labellisés en France (en vert) et en cours d'étude (en jaune). (Doc. Objectif SERM métropolitains)

Ces trois mesures sont les suivantes :

- Mise en place d’ici la fin 2025 de dessertes continues, dans la journée, en soirée et les week-ends, partout dans les territoires labellisés SERM où des dessertes périurbaines existent à l’heure de pointe. Cette mesure  doublerait l’offre existante de trains périurbains « sans nécessiter de travaux d’infrastructure ou d’acquisition de matériels, pour un coût annuel de 300 millions d’euros, estime Objectif RER métropolitains qui demande que cette somme soit « prise en charge provisoirement par l’Etat ». Notre commentaire : s’il est vrai que le matériel roulant a tendance à dormi les soirs et fins de semaines, une partie non négligeable est mobilisée dans les ateliers ce qui impliquerait dans de nombreux cas un renforcement du parc (on connaît le nombre d’annulations par manque de rames).

- Procéder aux arbitrages financiers  nécessaire sà la mise en place des projets SERM tant en investissement qu’en fonctionnement « dans l’esprit des décisions déjà prises en 2018 et 2023 pour le financement du métro du Grand Paris » soit le Grand Paris express, bientôt 50 milliards d’euros d’investissement pour 200 km de lignes nouvelles. Très justement, le collectif insiste sur le fait qu’il s’agit là « d’une question d’équité territoriale ».

- Mettre en débat « dans les 18 mois » chacun des projets de SERM « en associant de la façon la plus large les acteurs du territoire sous l’autorité de la Commission nationale du débat public et en liaison avec le processus de labellisation ».

Un début de chemin pour financer le surcoût d’exploitation, quid pour l’investissement ?

 Jean-Claude Degand, porte-Parole d'Objectif RER métropolitains, se félicite qu’après deux semaines de discussion du projet de loi de finance 2025 « la question du financement des RER en régions » se soit « frayé un chemin », côté fonctionnement, tout en admettant qu’il faudra attendre le probable recours à l’article 49-3 « pour connaître les termes des décisions adoptées ». Mais, il existe après déclarations du ministre du Budget Laurent Saint-Martin, « un espoir raisonné à ce qu’une issue soit trouvée au problème du financement des 24 RER en régions », ajoute M. Degand, qui souligne que « dans le contexte actuel cela mérite d’être salué ». Or « l’attribution d’une ressource mobilisable par les collectivités pour le fonctionnement est une confirmation indispensable pour que les collectivités s’engagent vraiment sur ces projets », ajoute-t-il.

Rame TER Auvergne-Rhône-Alpes sur voie de garage sur le faisceau de Saint-Etienne Châteaucreux. Une augmentation des fréquences et des amplitudes horaires serait-elle possible à parc constant ? Dans cette région, il est probable que ce serait difficile, en raison des tensions déjà existantes pour les services actuels. Plusieurs lignes, telles Lyon-Grenoble, sont déjà exploitées avec un temps de rebroussement minimal à Grenoble. ©RDS 

 On voit poindre une adaptation du versement mobilité des employeurs qui « dégagerait un versement additionnel pour les SERM ». Mais une augmentation serait-elle supportable par un tissu économique déjà lourdement sollicité ? Un relèvement du plafond de 0,5 point de pourcentage « couvrirait environ la moitié du financement estimé nécessaire pour le fonctionnement des SERM auquel s’ajouterait les autres ressources mobilisables », calcule M. Degand. Qui insiste sur le fait que « le fléchage de ces financements vers les SERM est une condition impérative » alors que les amendements se sont multipliés pour rendre possibles d'autres affectations » ce qui selon lui « serait la porte ouverte à une remise en cause de l’objectif ».

  Reste à déterminer que sera la structure qui percevra ce versement mobilité. « Il ne peut s’agir que de structures unifiées, émanation des niveaux régional, métropolitain et intercommunal qui ont présenté les projets SERM en juin dernier et qui sont appelées à porter les projets SERM dans la durée », estime le représentant d’Objectif RER métropolitains, car « un morcellement des financements ouvrirait la voie à la dilution des projets et à la remise en cause de l’objectif ».

 Reste enfin la question du financement de l’investissement au-delà des Contrats de plan Etat-Régions (CPER), déterminante pour les projets les plus importants. « Sans une ressource dédiée analogue à celle qui a été mobilisée pour le métro du Grand Paris qui permet de rembourser des emprunts long terme, ces projets resteront à quai », juge M. Degand.

« Convaincre » les entreprises ?

 Si, compte tenu de la pression fiscale considérable que connaissent les Français, toute mesure fiscale « fait débat », le collectif  souligne « le caractère vertueux d'un financement des RER en régions par des mesures assises sur la richesse qu'ils vont créer ». Il s’agirait de convaincre les entreprises que la contrepartie de ces financements sera l’amélioration des déplacements domicile-travail de leurs salariés et qu’elle se traduira par leur association à la gouvernance des mobilités.

 Reste à trouver globalement les 100 milliards d’euros estimés pour la réalisation de ces projets. Or l’Etat tente de rejeter ses responsabilités de propriétaire du réseau sur les collectivités locales, la dette publique explose et ses intérêts explosent, le déficit commercial atteint des sommets, et l'effondrement des commandes à l'industrie française se poursuit, selon les termes d’un observateur de la réalité économique.

Rames TER Occitanie sur les voies dédiées aux services du quart nord-est toulousain, en gare Matabiau côté nord. Une intensification des services rencontrera un jour les limites de capacité de l'infrastructure. Dans ce cas précis, les aménagements ferroviaires nord Toulouse (AFNT) avec passage à quatre voies permettra à la fois de ménager l'arrivée des TGV de la ligne nouvelle venant de Bordeaux (et de Dax) et l'intensification des services TER de cet axe. Restera la question du cisaillement d'éventuels services diamétraux. ©RDS 

 On comprend pourquoi, à propos du SERM de Toulouse, la directrice territoriale de SNCF Réseau en Occitanie, Catherine Trevet, insiste sur la nécessité de progressivité de sa mise en place avec pour priorité l’optimisation de l’infrastructure existante. Nous ajouterons que pour le matériel roulant, l’augmentation des fréquences pourrait se faire à parc constant moyennant, au moins pour partie, la diminution des capacités unitaire par limitation des rames doubles… mais au risque de faire bondir le devis des péages exigés par SNCF Réseau.

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B
Besançon a une étoile ferroviaire, mais j' ignore si la "branche nord" (Besançon Viotte - Besançon Franche-Comté TGV) peut encore accueillir une "mini-branche Devecey" (800 mètres à réamenager) qui permettrait un véritable service periurbain "nord", avec des haltes à Ecole Valentin (en service), Miserey Salines, Les Auxons, et Devecey (à créer) . Se rabattre uniquement sur les navettes TER entre les deux gares TGV n' apportera pas de bons horaires pour les travailleurs, car les navettes sint dépendantes des arrêts TGV à BF-C TGV..............et donc de gros trous aux heures de déplacements domicile-travail et retour.<br /> <br /> Il serait judicieux de créer (ou recréer) un évitement à Etalans (ligne des Horlogers) pour une bonne capacité périurbaine sur Besançon Viotte - Valdahon . Cela profiterait aussi aux TER "au delà" de Valdahon (Morteau et Suisse).<br /> <br /> Quid du plan présenté par un cabinet Parisien pour un service tram-trains sur les 4 branches électrifiées de l' Etoile Bisontine, en 2012 ? En sus de Devecey (voir plus haut), un service (Dole ?) Saint Vit - Baume les Dames et (Devecey et/ou BF-C TGV ?) Viotte - Mouchard serait obligatoire, et probablement les 3 branches les plus fréquentées.
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B
Hum, le tramway est bien arrivé à Viotte, même s' il est vrai qu' initialement il devait être juste devant l' entrée "haute Sud", et non "bas Sud" comme désormais (Sud : le parvis principal (direction Centre-Ville)) . Dans l' ensemble, les usagers des transports (dont l' AUTAB) sont plutôt satisfaits de "la nouvelle Viotte" de 2014.<br /> <br /> Par contre, vous m' apprenez donc que c' est RFF qui a saboté le projet de tram-trains . Bon, si nos zélites Bisontines - n' est ce pas Mme VIGNOT, et Mrs CROIZIER et FAGAUT ! - veulent développer un véritable SERM, il faudra alors reprendre cette étude, il n' y a pas d' autre solution pour une desserte efficace de la majorité des localités du GBM.<br /> <br /> Côté tramway, il y a en actualité les 5 rames Alstom qui opèreront à partir de la rentrée 2025 . Il faudra cependant penser à de possibles prolongements de lignes, tel la T1 qui, aux Marnières (Chalezeule) , se trouve à 500 mètres de la voie ferrée (une station Chalezeule TER/Tram ?) . Et, avec ambition, un prolongement depuis les Hauts du Chazal jusqu' à Franois TER ? Ou, la création d' une halte TER aux Hauts du Chazal - CHU, demandée depuis longtemps et proche du tronc commun des deux lignes trams ?
P
Besançon, il y avait une belle opportunité de tram-trains rayonnant autour de Besançon, tuée par qui, par RFF bien sûr ; et on peut être rassuré, le raccordement en gare de Besançon Viotte au tramway n'est maintenant plus possible. Quant à attendre l'enquête publique pour que les citoyens puissent faire des suggestions, on sait très bien que quand on est à l'enquête publique, tout est déjà bouclé et, sauf très rare exception, le projet est validé tel quel.
Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
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