La région Occitanie pérennise la ligne Nîmes-Le Grau-du-Roi en payant les deux-tiers de sa rénovation
Depuis le 23 septembre et jusqu’au 29 novembre, la ligne à voie unique non électrifiée reliant Nîmes Saint-Césaire au Grau-du-Roi est neutralisée sur la majorité de son itinéraire pour réalisation de travaux lourds de régénération. Sur les 40,509 km de son linéaire depuis son embranchement à la station périphérique de Saint-Césaire jusqu’au terminus du Grau-du-Roi, 13 km de voie sont en cours de renouvellement, entre Vauvert et Le Grau-du-Roi sur les sections les plus obsolètes et dégradées. Il s'agit d'une excellente nouvelle au vu des ressources de trafic vers la banlieue de Nîmes et le littoral aux grandes stations balnéaires, ressources notoirement sous-exploitées.
Signe de l’implication active de la région Occitanie dans l’entretien et la modernisation du réseau de lignes majoritairement parcourues par ses TER, ce chantier d’un coût de 10,8 millions d’euros voit le conseil régional apporter 66,5 % du devis, l’Etat et l’Union européenne apportant 25 % et SNCF Réseau 8,5 %.
Bâtiment voyageurs de la gare d'Aigues-Mortes. L'offre de transport public de et vers Nîmes est majoritairement routière hors haute saison d'été avec la ligne 132 du réseau LiO Bus, parallèle à la ligne de train TER et avec une tarification spécifique. Les trains TER ne se poursuivent malheureusement pas au-delà de Nîmes, malgré quelques anciennes tentatives de de trains d'été amorcés à Alès. ©RDS
Cent-cinquante agents, se répartissant entre des collaborateurs de SNCF Réseau et d’Azurail, entreprise de travaux ferroviaires basée à Avignon, sont mobilisés depuis le 15 septembre et jusqu’au 15 décembre pour réaliser l’opération. Du 15 au 23 septembre, les deux entreprises ont réalisé les travaux préparatoires – aménagement d’une base, apport des engins, des composants, mise en sécurité des emprises… - avant la neutralisation qui a débuté le 23 septembre entre Vauvert et Le Grau-du-Roi, jusqu’au 29 novembre.
Fin octobre, du 22 au 31, la section Nîmes Saint-Césaire – Vauvert, longue de 17 km, dessert Générac et Beauvoisin, principalement utilisée par des navetteurs, était à son tour neutralisée avec, comme le reste de la ligne, transfert sur route.
Le recours à la technologie edilon)(sedra de voie béton sur passage à niveau
Outre le renouvellement voie et ballast, cinq aiguillage obsolète sont supprimés et six ouvrages hydrauliques confortés. Le passage à niveau d’Aimargues (n°25 bis) a été entièrement reconstitué avec emploi du système edilon)(sedra qui permet de limiter l’usure du rail par le trafic automobile. Ce système, utilisé depuis un demi-siècle, est basé sur la technologie du rail noyé.
La division edilon)(sedra, du groupe britannique James Walker basé dans le Surrey, est spécialisée dans les voies sans ballast. Sur son catalogue, elle détaille ainsi son système : « Le rail est fixé élastiquement dans une réservation en béton ou en acier à l’aide de l’élastomère bi composant edilon)(sedra Corkelast® et est soutenu par une bande sous rail du groupe de produits edilon)(sedra Trackelast®. Après durcissement, le Corkelast® reste légèrement élastique, mais très résistant, créant ainsi un maintien stable et durable du rail ».
/image%2F1336994%2F20241105%2Fob_7eca4d_edilon-sedra-wellington-3.jpg)
Démonstration du système de voie noyée de l'entreprise britannique edilon)(sedra. La vue est prise lors d'une reconstruction de passage à niveau sur le réseau régional électrifié de Wellington, en Nouvelle-Zélande, équipé de voie "Cape gauge" de 1,067 mètre de largeur. (Doc. edilon)(sedra )
« Le Corkelast® ERS, ajoute l'entreprise, assure un transfert uniforme des forces du rail vers l’environnement de support. Le système adresse les forces et tensions causées par le passage du trafic ferroviaire et routier, ainsi que les influences physiques telles que les variations de température ».
Catherine Trevet, directrice territoriale de SNCF Réseau, privilégie l’économie circulaire
D’importants travaux de stabilisation et renouvellement de la voie sont réalisés en particulier dans la zone la plus instable, sur des terrains sablonneux et gorgés d’eau, à hauteur d’Aigues-Mortes. Par ailleurs, hors de cette enveloppe, un nouveau quai est réalisé en gare du Grau-du-Roi, aux normes d’accessibilité pour personnes à mobilité réduite, sous la maîtrise d’oeuvre de Gares & Connexion, filiale de SNCF Réseau, pour un devis de 1,4 million d’euros entièrement financé par la municipalité du Grau-du-Roi. Les travaux débutés en octobre sont prévus pour six semaines.
Catherine Trevet, directrice territoriale Occitanie de SNCF Réseau, précise que SNCF Réseau « privilégie le réemploi des rails et des traverses, dans une logique de réduction de l’empreinte carbone » et d’économie circulaire.
/image%2F1336994%2F20241105%2Fob_629c6f_img-20220724-133257.jpg)
Sur la ligne Nîmes-Le Grau-du-Roi, dans un environnement peu incitatif, deux rames XGC des TER Occitanie. En saison touristique, le trafic impose une composition renforcée... mais la fréquence reste étique au long de l'année. ©RDS
Comme pour la réouverture d’Alès-Bessèges, le principe consiste à recycler des rails lourds issus de renouvellements voie-ballast sur lignes principales, après tri et sélection puis éventuellement meulage. Non seulement « l’empreinte carbone » est réduite, mais le coût global notoirement abaissé.
Utile à Vauvert, proche de Nîmes, comme au Grau-du-Roi, 120.000 habitants l’été
Jean Denat (PS), maire de Vauvert, commune 11.800 habitants qui a vu sa population croître de 136 % en soixante ans a déclaré à Midi Libre : « Il y a quelques années, la fermeture de la ligne semblait inéluctable. Aujourd’hui, non seulement elle reste ouverte, mais elle se modernise. Nous avons besoin de cette offre de transport, et je remercie tous ceux qui ont rendu cela possible. » Vauvert est située à 21 km de Nîmes Centre.
Outre cette grande banlieue de Nîmes, à l’extrémité sud de la ligne la commune du Grau-du-Roi compte 120.000 habitants l’été et 9.000 le reste de l’année. Sa voisine Aigues-Mortes en compte 8.500 hors saison (population doublée depuis 1980) avec une très forte fréquentation de visiteurs l’été.
Rame de mi-journée en courte attente de retour vers Nîmes, en gare du Grau-du-Roi. L'exploitation reste rudimentaire. La traction thermique contraste avec l'électrification du reste du réseau languedocien (excepté la ligne des Cévennes ), interdisant l'envoi de rames TGV en haute saison touristique malgré la demande faite par certains élus lors de la construction des lignes nouvelles. ©RDS
Le marché transport potentiel est donc considérable l’été, non négligeable le reste de l’année sous réserve d’une offre correcte. Rappelons que l’offre actuelle hors période de travaux et hors saison estivale propose en semaine deux allers-retours train TER avec un temps de parcours de 54 mn par sens tandis que les autocars LiO de la ligne 132 relient Nîmes Centre au Grau-du-Roi en 1 h 30 mn environ selon les heures et les dessertes plus ou moins fines. Le temps de parcours par autocar est donc 66,6 % supérieur à celui du train.
Rescapée du réseau de l’ouest de la Camargue
Rappelons enfin que la ligne Nîmes-Le Grau-du-Roi est la dernière rescapée du réseau de l’ouest de la Camargue, à voie normale. Deux autres lignes s’en détachaient : au Caylar vers la gare d’Arles Trinquetaille, à 23 km, sur la rive droite du Rhône (une liaison jusqu’à la gare de la rive gauche exista jusqu’à la destruction du viaduc sur le fleuve, à la fin de la Seconde Guerre mondiale) ; à Aimargues vers Lunel, à seulement 6,8 km. La section Aimargues-Le Caylar constituait un tronc à deux voies, commun sur 2,3 km à la ligne Nîmes-Le Grau-du-Roi et à la ligne Lunel-Saint-Gilles-Arles, cette dernière longue de 43,5 km. Le service voyageurs y fut supprimé dès 1938 par la SNCF.
La branche Lunel-Aimargues fut retranchée du réseau et déposée en 1971, transformée ces dernières années en « voie verte ». La branche Le Caylar-Arles, qui dessert Saint-Gilles, est « non exploitée ». Une réouverture de la courte section Lunel-Aimargues, moyennant aménagement d’une courte liaison ouest-sud évitant Aimargues, permettrait une desserte train Lunel-Le Grau-du-Roi, possiblement amorcée à Montpellier, d’une longueur de seulement 24,8 km de Lunel au Grau-du-Roi et de 46 km de Montpellier au Grau-du-Roi.
Saisies au passage, ces anciennes culées de pont-rail sur ce qui fut la deuxième voie entre Aimargues et Le Cailar, sur le court tronc commun des lignes Lunel- Sainte-Gilles-Tarascon et Nîmes-Le Grau-du-Roi. ©RDS
La route affiche un itinéraire de 31 km de Montpellier au Grau-du-Roi mais par un tracé au sud de l’étang de l’Or, ne desservant ainsi ni Baillargues (où a été installée une gare TER modernisée pour la banlieue est de Montpellier en plein développement), ni Lunel, commune dont la population affiche 27.000 habitants, en forte hausse.