Rénovations massives de matériel TER en Auvergne-Rhône-Alpes et en Occitanie : la bonne gestion par la maintenance
Entre la hausse de la fréquentation des TER et les contraintes budgétaires, l’heure est à la rénovation du matériel pour deux grandes régions du Sud-Est, Auvergne-Rhône-Alpes et Occitanie. Il s’agit de consolider et d’améliorer le parc existant pour une vingtaine d’années supplémentaires pour un coût moindre qu’un renouvellement, même si des achats de nouvelles rames sont programmés de part et d’autre du Massif central. Le vieux principe selon lequel la bonne maintenance est la première des richesses a convaincu les deux conseils régionaux qui communiquent abondamment sur ces rénovations, bien loin de la décision de la métropole de Montpellier de se séparer, sans rénovation intermédiaire, de tous ses tramways Citadis 401 acquis en 2000 pour en acquérir de nouveaux en remplacement.
Une hausse du trafic de 16 % en Occitanie, de 6 % en Auvergne-Rhône-Alpes sur un an en 2023
Il faut reconnaître que le capital-image et le capital-habitude des usagers des rames TER constituent un atout maître pour les services ferroviaires des deux régions. Les voyageurs identifient aisément le service et la ligne en fonction du matériel qu’ils ont l’habitude d’y emprunter souvent depuis des années. De plus, l’habitude d’usage de tel matériel permet une « prise en main » aisée par les voyageurs : répartition sur les quais, répartition à l’intérieur des voitures en fonction des destinations, etc…
Ces rénovations massives permettront d’assurer une base solide et durable pour l’exploitation, en attendant de nouvelles augmentations à venir du parc par réception de rames en cours de commande ou de construction, dans chacune de ces deux régions.
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Rames "à grande capacité" construites par Bombardier, dites AGC soit ZGC pour leur version électrique, ci-dessus en version Occitanie (service TER LIO) au départ d'Avignon Centre. La version bimode est nommée BGC, la version thermique XGC. ©RDS
La tendance est à l’augmentation de l’usage dans toutes les régions. En 2023, la tendance de la fréquentation exprimée en passagers/km par rapport à 2022 s’est établie dans les trois régions du Grand Sud-Est à (source ART) :
+ 16 % en Occitanie pour une évolution de l’offre exprimée en trains/km de - 6 % ;
+ 6 % en Auvergne-Rhône-Alpes pour une évolution de l’offre exprimée en trains/km de + 3 % ;
+ 9 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur pour une évolution de l’offre exprimée en trains/km de - 3 % ;
Si l'on compare 2023 à 2019, la hausse de fréquentation atteint 44 % en Occitanie, 20 % en Auvergne-Rhône-Alpes et 20 % en Provence-Alpes-Côte d'Azur.
171 rames TER modernisées pour 1,2 milliard d’euros en Auvergne-Rhône-Alpes
Auvergne-Rhône-Alpes, a réceptionné sa première rame TER rénovée (TER 2N) en mars dernier, première de son programme massif de modernisation du matériel roulant parallèlement à l’acquisition de rames neuves. Alors que la Chambre régionale des comptes a récemment pointé l'insuffisance de matériel roulant dans la région, au total 1,2 milliard d’euros seront investis par le conseil régional dans la rénovation et la modernisation de son parc, en priorité ses rames à deux niveaux. Le coût unitaire de la rénovation intégrale de ces rames s’élève en moyenne à 4 millions d’euros.
Sur les 434 engins moteurs du service TER d’Auvergne-Rhône-Alpes (y compris les rames françaises du Léman Express), 171 rames TER seront modernisées pour une prolongation de 20 années de leur durée de service, qui les portera jusqu’à leur quarantième anniversaire voire au-delà. Seule une dizaine de rames sont mobilisées dans les simultanément dans les centres techniques afin de ne pas impacter l’offre commerciale. Chaque année, une vingtaine de rames seront modernisées, soit une campagne s’étalant sur un peu plus de huit ans.
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Cette rame TER 2N NG provenant d'Annecy et à destination de Valence Ville, s'apprête à traverser le centre de Grenoble sur la célèbre estacade construite pour les Jeux olympiques d'hiver de 1968. ©RDS
La « grande révision générale » porte sur le traitement de la corrosion, la reprise des étanchéités, un renouvellement des sièges et décorations intérieures, de la livrée extérieure. Les planchers seront entièrement renouvelés et l’accessibilité « optimisée ». Outre l’amélioration du confort, la région entend limiter les dysfonctionnements impactant le service, en traitant en particulier la motorisation et les circuits électriques ou électroniques.
« Pour passer de 220.000 voyageurs par jour à 300.000 en 2035, nous avons annoncé dans notre feuille de route pour les mobilités ‘’Cap sur 2035’’ un doublement des investissements dans le matériel roulant (…) avec une capacité d’emport supplémentaire de 60.000 places », a indiqué Frédéric Aguillera, vice-président du conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes délégué aux Transports.
Rénovation des TER2N très présents en Rhône-Alpes, questions sur les X73500
La rénovation va concerner principalement les rames TER2N PG (16 rames) et NG (60 rames), ces rames à deux niveaux datant du début des années 2000 et omniprésentes sur Grenoble-Lyon, sur le sillon alpin Annecy-Valence, sur les relations omnibus de ces deux axes. Les AGC sont aussi concernés, à l’image de leurs homologues occitans, tels que les ZGC électriques (15 rames en Auvergne-Rhône-Alpes), BGC bimodes (41 rames), XGC thermiques (26 rames). Les ZGC sont actuellement en particulier présents sur la vallée de Rhône et en renfort sur Saint-Etienne-Lyon, les XGC sur Saint-Etienne-Montbrison-Boën, Saint-Etienne-Le Puy…
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Doublet d'automoteurs thermiques X73600 en provenance de Gap et à destination de Grenoble, à l'entrée de la gare de Lus-la-Croix-Haute. La grande famille des X73500 aura-t-elle une descendance ? ©RDS
On n’est pas fixé sur le sort des 86 autorails monocaisse 73500, -600 et -700 livrés au tout début des années 2000 et qui circulent par exemple sur Saint-Etienne-Roanne, Grenoble-Gap, Clermont-Ferrand-Montluçon, Clermont-Ferrand-Volvic, l’étoile d’Aurillac, Moulins-Clermont-Ferrand-Vic-le-Comte-Brioude (électrifiée sur sa partie nord)… Ces engins monocaisse, aux larges baies vitrées, à la bonne capacité, au confort apprécié et à la belle puissance (2 moteurs MAN totalisant 514 kW soit l’équivalent de leurs célèbres prédécesseurs X2800) atteignent leurs 25 ans d’âge.
Parallèlement, Auvergne-Rhône-Alpes va investir d’ici 2035, soit une décennie, quelque 1,5 milliard d’euros dans l’acquisition de 130 rames neuves. Enfin, 300 millions d’euros seront investis dans la modernisation et la construction de centres de maintenance.
En Occitanie, le vaste parc des 83 rames AGC entièrement rénové pour 399 millions d’euros
En Occitanie, la démarche est semblable mais le parc est plus homogène, soit une dizaine de types de matériel roulant automoteur. Sur les 214 engins moteurs du service TER, la campagne qui a été lancé voici deux ans consiste à rénover 83 rames ZGC (56 rames) et BGC (27 rames) qui assurent la trame de base du service TER dans cette région. La première rame rénovée a été réceptionnée en mai. Ces automoteurs à grande capacité ont vu leur parc complété par 54 Regiolis reçus depuis cinq ans.
Les ZGC et BGC affichent une bonne vingtaine d’années de service. Leur grande révision générale devrait porter leur âge jusqu’à 40 ans voire au-delà. L’opération, réalisée dans les centres techniques industriels de SNCF Voyageurs de Nevers et Périgueux applique des opérations similaires à celles appliquées sur les rames d’Auvergne-Rhône-Alpes. Un système de comptage des voyageurs y sera installé de même qu’une climatisation sans liquide frigorigène et automatiquement réglée sur le taux d’occupation de la rame.
Rame ZGC en gare de Nîmes Centre. La ligne du Bas-Languedoc Avignon/Marseille-Narbonne-Port Bou connaît une explosion de son trafic liée à la configuration multi-urbaine en chapelet de cet itinéraire: Avignon, Nîmes, Lunel, Montpellier, Sète, Agde, Béziers, Narbonne, Port-la-Nouvelle, Perpignan, Elne, Cerbère... ©RDS
Le nombre de places assises devrait être augmenté, pour une capacité supplémentaire équivalant à deux nouvelles rames. Ce gain est possible grâce à la mise aux normes 2e classe (4 places de front) de l’ancienne 1ère classe (3 places de front) et par la suppression d’un petit espace bar dans les rames de l’ancien parc TER Midi-Pyrénées.
L’Occitanie va se convertir aux rames à deux niveaux
Cette année, six rames rénovées ont été réceptionnées et remises en circulation et quatre autres sont en cours de traitement. L’opération lancée fin 2022 devrait s’étaler sur six à sept années. Son montant total est évalué à 399 millions d’euros. L’Occitanie va acquérir 18 Régio 2N auprès d’Alstom, se convertissant ainsi aux trains à deux niveaux, dans cette région possédant peu de rames à deux niveaux (services Pau-Toulouse) contrairement à ses deux voisines Provence-Alpes-Côte d’Azur et Auvergne-Rhône-Alpes, et construit un troisième technicentre régional, à Narbonne, le tout pour 700 millions d’euros.
La question de la pérennité des X73500 détenus par le service TER d’Occitanie, au nombre de 38, se pose dans les mêmes termes qu’en Auvergne-Rhône-Alpes. En Occitanie, ils roulent principalement sur Toulouse-Auch, Nîmes-Alès, La Bastide-Mende-Marvejols. Leur nombre, bien inférieur à celui d’Auvergne-Rhône-Alpes, s’explique par le taux supérieur d’électrification du réseau en Occitanie, la longue ligne Béziers-Neussargues (277 km) étant elle-même électrifiée.
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En gare de Brioude (Haute-Loire), rencontre d'une rame Regiolis flambant neuve (à g.) et d'un couple de X73500 du service TER Auvergne-Rhône-Alpes, particulièrement dense de Brioude à Clermont-Ferrand. La rénovation des rames arrivées à mi-vie s'accompagne dans les deux régions étudiées d'une extension du parc TER par acquisition de rames neuves. ©RDS
En Occitanie sont exploités en mode thermique Nîmes-Clermont-Ferrand, La Bastide-Le Monastier, le quart nord-est toulousain, Toulouse-Auch, Nîmes-Le Grau-du-Roi. En Auvergne-Rhône-Alpes sont exploités en mode thermique Livron-Veynes et Grenoble-Veynes, Lyon-Bourg, Saint-Germain-au-Mont d’Or-Saint-Germain-des-Fossés, Lozanne-Paray-le-Monial-Moulins et la totalité du réseau de l’ancienne région Auvergne à l’exception de Clermont-Ferrand-Nevers-Paris et de la courte section cantalienne de la ligne Béziers-Neussargues.