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Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
19 décembre 2022

Explosion du prix de l’électricité : au bord du précipice, le fret ferroviaire met le gouvernement en demeure

 La loi climat, adoptée en août 2021, prévoit un doublement de la part modale du fret ferroviaire en 2030, soit sur une petite décennie. Mais pour l’instant, c’est la multiplication par plus de huit du prix de l’énergie électrique qui frappe les tractionnaires du fret ferroviaire, au risque d’entraîner non pas une augmentation mais une réduction de leur part modale, alors qu’elle avait légèrement augmenté cette année, de 9 % à un peu plus de 10 %.

DSCN1064Sous-station de la Castelle, alimentant en 25 kV la partie ouest du Contournement de Nîmes et Montpellier (CNM, mixte fret-TGV). L'envolée du prix de l'électricité menace de faire s'effondrer le modèle économique des transports utilisant cette énergie. ©RDS

 Le secteur s’alarme et demande un traitement similaire (quoique moins coûteux pour l'Etat) à celui appliqué en Allemagne, où le prix du mégawattheure (MWh) va être plafonné par l’autorité fédérale à 130 € en 2023. Certains opérateurs ferroviaires menacent d’un blocage des voies d’Ile-de-France.

Multiplication entre 8,5 et 10 du prix du mégawhatheure en trois ans !

En France, la facture de l’électricité payée par le secteur du fret ferroviaire à SNCF Réseau passera de 56 €/MWh en 2021 à 473,51 euros/MWh pour 2023, soit une multiplication par 8,5 en deux ans, selon une estimation de l’Alliance 4F (Fret ferroviaire français du futur, opérateurs liés au fret), par dix selon l’Afra (Alliance française du rail, tous opérateurs alternatifs).

 L’Alliance AF a publié un communiqué solennel  enjoignant le gouvernement à rapidement plafonner le prix de l’électricité pour le ferroviaire : « Sans aide du gouvernement pour faire face  à la hausse du prix de l’énergie,  le fret ferroviaire, le transport combiné rail-route et  l’ensemble de la chaîne logistique française sont menacés ».

 L’Alliance 4F rassemble vingt-deux entreprises ayant part au fret ferroviaire, depuis  Fret SNCF et ses filiales spécialisées (ViiA, Captrain France…) jusqu’à certains acteurs de l’infrastructure hors SNCF Réseau (Voies ferrées de France, la Transalpine, les gestionnaires d’infrastructure indépendants de l’Agifi),  en passant par les transporteurs indépendants (Regiorail, Lineas, Europorte, DB Cargo, T3M, Objectif OFP…).

IMG_20220524_151012844Rame de wagons porte-conteneurs en transit à Avignon Centre, tractée par une locomotive de fret SNCF. Les filiales fret du groupe public français sont membres de l'Alliance 4F, celle qui interpelle le gouvernement sur l'impact catastrophique de l'envolée du prix de l'électricité. ©RDS

 L’Alliance 4F avait rencontré le ministre délégué aux Transports Clément Beaune le 15 novembre pour le mettre en garde contre l’effondrement du système en raison de l’envolée du prix de l’électricité sur le marché. Ce dernier a été dérégulé sur ordre de l’Union européenne et avec la bienveillance active des gouvernements français depuis une décennie. Or le ministre délégué n’avait donné aucune réponse à la mi-décembre, probablement en attente des décisions du ministère des Finances, décisionnaire-clé en la matière.

4F demande un plafonnement à 180 € le MWh, 50 € de plus qu’en Allemagne

 Les délégués de 4F demandaient la mise en place sans  délai de deux mesures d’aide : Un plafonnement du prix de l’électricité à 180 € le MWh, soit 50 € de plus par rapport a ce qui a été accordé au secteur par le Bundestag allemand ; l’aménagement  du dispositif d’aide aux péages afin qu'il prenne à sa charge l’intégralité des péages fret  facturés par SNCF Réseau.

« Le ministre avait donné rendez-vous à la filière sous quinzaine après instruction du sujet  entre la filière et ses services » révèle le communiqué de l’Alliance 4F, qui s’indigne qu’un mois après la rencontre le silence du ministère soit demeuré assourdissant. « Les entreprises  du secteur  ne disposent d’aucune visibilité sur les aides qu’elles demandent  pour faire face à l’explosion des prix de l’électricité dont le caractère insoutenable met en péril la poursuite de leur activité – surtout pour les plus petites d’entre elles et qui ne peuvent bénéficier du régime d’aide générale », met en garde le texte.

Liste des entreprises ou associations membres de l'Alliance 4F. Les filiales fret du groupe SNCF sont largement représentées, au côté de tractionnaires concurrents et d'autres entreprises ou syndicats liées au rail, y compris à l'infrastructure. SNCF Réseau n'en est pas membre. (Doc. Alliance 4F) 

 L’absence de soutien  touche aujourd’hui l’ensemble de la chaîne logistique,  y compris les transporteurs routiers utilisateurs  du transport combiné rail-route, qui risquent de subir une hausse de coût allant de 10 % à 20 %, détaille 4F. Il en résulte une menace « d’arrêt des flux multimodaux et un déficit de capacités de transport, la route n’ayant pas la capacité d’absorber l’ensemble  du volume de marchandises  circulant sur le rail », poursuit-elle. « Toute la chaîne logistique d’approvisionnement française risque d’en être affectée », prévient-elle, pointant implicitement le risque que cette explosion du prix de l’électricité dans le transport ferroviaire entraîne un emballement de l’inflation des prix à la consommation et des pénuries dans la distribution.

Franck Tuffereau, de l’Afra, estime que le prix de l’électricité a été multiplié par dix en trois ans

 Du côté de l’Association française du rail (Afra) qui rassemble les opérateurs fret et voyageurs alternatifs à l’entreprise historique d’Etat SNCF (mais elle inclut sa filiale fret Captrain), le ton monte aussi. Franck Tuffereau, délégué général de l’Afra indique pour sa part que que le prix fixé par SNCF Réseau, de 45 euros en 2019, va passer à 450 euros le 1er janvier prochain, soit une multiplication par dix.

DSCN3573Rame fret tractée par DB Cargo à la Castelle sur la commune de Lattes, jonction du Contournement de Nîmes et Montpellier et de la ligne historique, côté Sète. Arrêter un train sur chacune des deux voies en aval suffirait à paralyser le trafic sur l'axe languedocien, stratégique entre sud-est et sud-ouest de la France et entre France et Espagne de l'Est. ©RDS 

 « Les opérateurs ont été mis au pied du mur car ils ont appris cette hausse en septembre. Certains, qui ont essayé de changer de fournisseur d’électricité, notamment auprès d’EDF, se sont vus opposer une fin de non-recevoir au motif qu’ils ont déjà un fournisseur », explique-t-il  dans des propos rapportés par La Lettre du Cheminot. (1)

 La tension est telle que certains de ces tractionnaires alternatifs envisagent de bloquer le trafic en immobilisant des engins « sur des nœuds ferroviaires stratégiques » en Ile-de-France, provoquant une paralysie des flux à l’image de certaines actions des transporteurs routiers.  Tout « en n’ayant pas l’habitude d’en arriver là », ils préviennent le gouvernement « qu’ils ont un vrai pouvoir de nuisance ».

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(1) Lien vers l’article de La Lettre du Cheminot :

Des opérateurs de fret ferroviaire prêts à des actions de blocage pour se faire entendre - Lettre du cheminot

Accueil / Association ferroviaire / Des opérateurs de fret ferroviaire prêts à des actions de blocage pour se faire entendre Par : Marie-Hélène POINGT La flambée des prix de l'énergie risque de conduire des opérateurs de fret ferroviaire à mettre la clé sous la porte, alerte Franck Tuffereau, le délégué général de l'Association française du rail.

https://www.lettreducheminot.fr

 

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Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
  • Le chemin de fer est indispensable à toutes nos villes et ne doit pas être l'apanage de la seule région-capitale. Les lignes transversales, régionales et interrégionales doivent contribuer à une France multipolaire, équitable au plan social et territorial.
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