Le bilan de la mandature municipale et métropolitaine 2014-2020 à Marseille affiche une courte extension de la ligne 2 du métro au nord et une petite extension du réseau de tramways avec cinq nouvelles stations. Ces avancées ne permettent pas de constituer un réseau lourd digne d’une commune de 870.000 habitants située au cœur d’une première intercommunalité (Territoire Marseille-Provence) de 1.050.000 habitants et d’une métropole à statut particulier (Aix-Marseille-Provence) de 1.900.000 habitants.
Plan des lignes de métros et tramways de la RTM, exploitant du réseau urbain de Marseille, avec les lignes de bus à haut niveau de service qui prolongent en correspondance les axe lourds, faute de leur extension hors de la zone centrale.
Une extension de 900 mètres du métro au nord, de 1,2km du tramway au sud
Le 16 décembre 2019, la ligne 2 du métro de Marseille exploité par la RTM et qui en compte deux, était prolongée de 900 mètres depuis Bougainville jusqu’à Gèze, du nom du capitaine Arnaud Gèze décédé au cours des combats de la libération de Marseille le 24 août 1944. Cette prolongation, dont la mise en service a pris des années de retard malgré un co-financement de la Banque européenne d’investissement datant de 2014, jouxte les ateliers de maintenance de Zoccola. Elle s’accompagne d’une vaste restructuration du réseau des bus urbains des XIVe, XVe et XVIe arrondissements.
Plus importante, mais décidée au cours du mandat précédent, la mise en service de la ligne 3 du réseau de tramways, le 30 mai 2015, a enrichi ce dernier de cinq nouvelles stations et 1,2 km supplémentaires. Cette ligne 3, qui n’est pour l’instant longue que de 3,6km, est amorcée à Arenc-Le Silo, terminus commun avec la ligne T2 Arenc-Le-Silo-Blancarde, suit une section commune de 2,4km et 6 stations –terminus inclus) avec cette dernière jusqu’à Belzunce-Alcazar, puis s’en sépare pour remonter la rue de Rome à partir du cours Saint-Louis jusqu’à Castellane, où elle offre une correspondance avec les deux lignes de métro M1 et M2 qui s’y croisent. A Arenc-Le Silo, les terminus des lignes T2 et T3 sont en correspondance avec les TER desservant la station à voie unique Arenc-Euroméditerranée, un maillage heureux mais avec un fréquence TER faible dans une optique urbaine (lire plus loin).
Rame Bombardier Flexity de la ligne T2 sur la Canebière. Plus bas sur la célèbre avenue, elle rejoindra celles de la nouvelle ligne T3 provenant de Castellane, pour un parcours partagé jusqu'à Arenc-Le Silo. © RDS
Le réseau de métro de Marseille affiche deux lignes développées sur 21,8km et 31 stations dont deux communes, soit 12,9km et 18 stations pour la ligne 1, six kilomètres et 13 stations pour la ligne 2. Le réseau de tramways affiche désormais trois lignes totalisant 15,5km de services distincts mais 13,1km de doubles voies.
Depuis fin 2014, augmentation de la fréquence sur Marseille-Aubagne, mais moins que prévu
Notons enfin le développement de l’offre TER entre Marseille-Saint-Charles et Aubagne (6 stations) grâce au passage de deux à trois voies sur cette section de la vallée de l’Huveaune, fortement urbanisée, à la fin de l’année 2014, permettant un service omnibus cadencé à la demi-heure en semaine, auquel il faut ajouter les directs sans arrêt entre Saint-Charles et Aubagne, soit environ un train toutes les demi-heures en pointes. On est encore loin d’une fréquence aux 10mn annoncée par RFF dans le dossier de présentation de l’avant-projet.
A Marseille-Saint-Charles, TER en attente de départ vers Aubagne. Une troisième voie encore peu exploitée. © RDS
Notons aussi les 4 arrêts marseillais de la ligne d’Aix-en-Provence à fréquence péri-urbaine. Et celui de l’Estaque desservi à une cadence irrégulière (de 3 à 1 desserte à l’heure) par les services Marseille-Miramas via Rognac ou via Martigues et Port-de-Bouc, qui desservent éventuellement sur la boucle Saint-Charles-L’Estaque la station Arenc-Euroméditerranée, inaugurée début 2014, avec une fréquence à l’heure, au mieux à la demi-heure. L’offre sur le réseau ferré national est, on le verra, bien inférieure à celle de Gênes par exemple, et ne comporte aucune transversalité. Pourtant le raccordement des Chartreux, peu utilisé et qui permet d’éviter la gare Saint-Charles, permettrait de créer des services transversaux complémentaires aux services radiaux existants sans attendre les colossaux travaux d’une gare souterraine, avec desserte de Marseille-Blancarde, gare reliée à deux lignes de tramway et à la ligne 1 du métro.
Des projets axés sur l’automatisation du métro et l’extension de réseau de tramway
Les petites avancées de ce mandat (0,9km d’infrastructure de métro, 1,2km d’infrastructures de tramway) contrastent avec les projets considérables qui viennent ont été adoptés depuis 2014, avec un financement complémentaire du département en faveur de la Métropole de 220 millions d’euros pour compenser le manque d’engagement de l’Etat.
Le principal de ces projets, déjà engagé, est celui de l’automatisation des deux lignes de métro, avec pour objectif le printemps 2025 pour la M1 et l’automne 2026 pour la M2. Cet investissement, avec renouvellement du parc par des rames automatiques dont la première devrait arriver fin 2022, s’accompagne de la « mise en accessibilité » pour les personnes handicapées de plusieurs stations importantes. Celle de Sainte-Marguerite-Dromel est en voie d’achèvement. Vont suivre Vieux-Port, La Rose, Timone, Jules-Guesde, Rond-Point du Prado et Saint-Charles entre 2023 et 2024, avant généralisation.
Escaliers monumentaux de la gare Saint-Charles, inaugurés en 1927. Les stations croisées des deux lignes de métro sont situées à grande profondeur par rapport au plateau des voies SNCF. © RDS
En revanche, la Métropole ne fait pas mention d’extensions des lignes de métro, malgré des avant-projets évoqués mais aucunement financés à ce jour de prolongation de la ligne 2 vers Saint-Loup et Rivoire-et-Carret au sud et de la ligne 1 vers Château-Gombert au nord-est. N’est pas traitée non plus la question de l’asphyxie des axes routiers depuis le VIIIe arrondissement côté mer vers l’hypercentre, susceptible d’être résolue par le mode lourd métro.
Les extensions de lignes sont réservées au réseau de tramway. Il est prévu deux phases d’extension. D’ici 2023 la prolongation au sud depuis Castellane jusqu’à La Gaye-Hôpitaux Sud. De 2023 à 2025, une autre prolongation au nord de Capitaine Gèze à Saint-Exupéry et la cité de La Castellane, au sud de La Gaye-Hôpitaux Sud jusqu’à La Rouvière. Ces prolongations visent à créer une magistrale nord-sud irriguant l’axe principal de Marseille. Enfin, toujours au programme du prochain mandat mais à l’horizon 2025, la création d’une nouvelle ligne dont la section propre se débrancherait de la ligne 3 actuelle rue de Rome à l’angle de la rue Peytral et courrait sur 2,1km vers l’ouest au-dessus de la rive sud du Vieux-Port jusqu’au quartier des Catalans, place du 4-Septembre, non loin de la corniche du Président-Kennedy qui passe en bord de mer, au pied de la colline de Notre-Dame de la Garde. Il reste à déterminer où seront amorcées les missions de cette antenne, par parcours commun avec d’autres lignes.
Il reste aussi à financer ce plan ambitieux dont le calendrier pourrait, comme pour de précédents projets à Marseille, être bousculé par d’inévitables considérations financières, compte tenu principalement du désengagement de l’Etat des infrastructures ferroviaires urbaines en « province ».
Pourtant le grand Marseille et son million d’habitants, sans parler de sa métropole multipolaire avec Aix et Fos qui couvre les deux-tiers du département des Bouches-du-Rhône (et même une commune du Vaucluse et une du Var) et dont la densité ferroviaire est manifestement insuffisante, affiche des besoins considérables. Notons que Marseille, dont le réseau de transport public reste sous-dimensionné, voit s’achever le chantier de la dernière grande autoroute urbaine en Europe, la « L2 » ou A750 qui se développe à l’est de la zone urbaine centrale sur près de 9,7km dont une partie en tranchée couverte, pour un coût de près de 100 millions d’euros par kilomètre.
La comparaison avec Valence, Barcelone et Gênes n’est pas à l’avantage de Marseille
Avec Valence, Barcelone et Gênes, Marseille est l’un des quatre grands ports européens de la Méditerranée occidentale. Nous donnons ici un résumé des réseaux ferroviaires urbains de ces villes afin d’établir une comparaison avec Marseille qui, rappelons-le, offre à ses 870.000 habitants deux lignes de métro sur 21,8km et trois lignes de tramways sur 15,5km de services et un service de TER urbains à fréquence modeste, réduit à quelques stations sur la ligne d’Aix, à une station près du port et au développement de l’axe de l’Huveaune.
Valence, 791.000 habitants, a développé un réseau de métro à partir de lignes régionales à voie métrique rayonnant depuis la ville-centre, en établissant des transversales. La ville espagnole affiche ainsi 6 lignes de métro à prolongements suburbains totalisant 179,98km de services, et trois lignes de tramway totalisant 28,23km. Deux lignes mixtes « métro-tramway » sont en cours de construction sur 9,5km.
Barcelone, dont la commune-centre compte 1,6 million d’habitants, affiche 7 lignes de métro totalisant 121,4km et 158 stations et six lignes de tramway cumulant 46km de services. S’ajoute un dense réseau de trains de banlieue à dessertes centrales, entre Rodalies du réseau Renfe et lignes du réseau catalan FGC.
Gênes, connaît une situation géographique très contrainte et une très forte concentration des flux entre mer et montagne. Le transport ferroviaire urbain et péri-urbain est dominé par l’axe transversal du réseau ferroviaire national entre les gares de Nervi (est), Brignole, Piazza-Principe et Sampierdarena et trois branches vers Voltri (ouest, côte), Pontedecimo (nord) et Acquasanta (ouest, montagne). Sur ces voies sont exploitées trois lignes cadencées de la Ferrovia Metropolitana Urbana dans le cadre de relations régionales à plus longue distance. La fréquence entre Genova-Brignole et Genova-Piazza-Principe (temps de parcours : 6mn) descend jusqu’à aux trois minutes, tous trains confondus. S’ajoute une ligne de métro léger de 7,1km et 8 stations depuis la gare de Genova-Brignole desservant la zone proche des installations portuaires, puis la gare de Genova-Piazza-Principe avant de s’orienter au nord-ouest vers Brin (et extension projetée jusqu’à Canepari). Notons aussi, dans cette zone fortement accidentée, l’existence de deux funiculaires affichant respectivement 7 et 5 stations et de la ligne locale à voie métrique Genova-Casella de 20 stations pour 24km.
Marseille, dont la surface de la commune centrale et ses 16 arrondissements est deux fois et demie plus importante que celle de la ville de Paris, souffre à l’évidence d’une sous-exploitation du réseau ferré national en service urbain, comme du manque d’extension de son réseau de métro.
Site consacré aux métros, tramways et RER (Paris, Lyon, Lille, Bordeaux, Strasbourg, Nantes, Clermont-Ferrand, Dijon, Marseille, Montpellier, Mulhouse, Nice, Orléans, Genève, Lausanne, Turin, Milan). Vous y trouverez des cartes très détaillées de ces différents réseaux.
http://carto.metro.free.fr