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Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
8 décembre 2019

Nîmes-Pont-du-Gard, une nouvelle gare TGV-TER exurbanisée aux correspondances chaotiques

La gare nouvelle exurbanisée de Nîmes-Pont du Gard sera mise en service ce  16 décembre avec l’horaire 2020. Cet établissement situé sur le Contournement de Nîmes et Montpellier (CNM) dans le prolongement de la ligne à grande vitesse dite Méditerranée (LN5) a la particularité, au contraire de Montpellier-Sud-de-France implantée 54,5km de distance sur la même ligne mixte fret-grande vitesse, d’assurer une correspondance TGV-TER. Elle est en effet située au croisement de la ligne nouvelle en partie haute et de la ligne classique Tarascon-Sète en partie basse. Les quais situés le long de voies de la ligne nouvelle courent pour partie sur le viaduc qui lui permet de franchir la ligne classique. Mais, à l’horaire prochain, ces correspondances sont délibérément sous-valorisées par SNCF Mobilités. La distance entre Nîmes-Centre et Nîmes-Pont-du-Gard est de 12,85km.

 Tous les trains à grande vitesse empruntant le CNM, soit environ un sur deux de l’axe languedocien, desserviront Nîmes-Pont-du-Gard. Les deux voies passantes originelles situées entre les deux voies à quai ont été neutralisées, les aiguillages n’ayant pas été posés pour raison d’économies. Tous les TER Occitanie transitant pas la ligne classique – très majoritairement des Nîmes-Avignon - marqueront un arrêt dans la partie basse, soit une vingtaine par jour et par sens. En revanche, aucun des six allers-retours Intercités de l’axe Grand Sud Bordeaux-Marseille, tous basculés à partir du service 2020 sur l’itinéraire classique, ne desservira Nîmes-Pont-du-Gard. L’accès à la gare nouvelle depuis Marseille, Miramas et Arles, en sera d’autant plus difficile.

Un bâtiment innovant englobant les deux plans de voies

 Le bâtiment voyageurs se situe dans l’angle sud-ouest de l’intersection entre les deux lignes qui se croisent à environ 80°. Le hall principal joue avec les deux plans de voies, présentant un développement vertical important. La maîtrise d’œuvre est assurée par l’Atelier d’Architecture Gare & Connexions, avec les architectes Bonnefille, Tricaud, Ricote et l’AREP.  Les travaux sont exécutés par Vinci Construction pour tous corps d’état à l’exception des lots techniques.

 La surface construite est de 3.000 m2. La surface des aménagements extérieurs, y compris une avenue de la gare longée de murs à parements de pierres sèches, financée par la communauté d’agglomération de Nîmes, atteint 20,6 hectares. SNCF-Réseau assure l’équipement des voies à quai sur la ligne à grande vitesse au niveau supérieur et des adaptations sur la ligne historique en contrebas. L’établissement est conçu pour accueillir 1,6 million de voyageurs par an. Il pourrait en recevoir un million pour 2020, sa première année d’exploitation, selon la SNCF qui tend à forcer le basculement du flux de Nîmes-Centre vers la gare nouvelle par des panneaux publicitaires dans la gare historique et des horaires favorisant fortement le CNM malgré les inconvénients des gares exurbanisées pour la majorité des populations locales ou en correspondance régionale (notre article du 8 novembre 2019).

Située sur l’ancien domaine viticole du Mas Larrier, dont le bâtiment historique sera conservé pour promouvoir les produits du terroir, la gare de Nîmes-Pont-du-Gard intéressera l’est gardois, l’ouest des Bouches-du-Rhône avec Arles, voire Avignon pour les trajets vers le sud. Elle se situe (par fer) à 12,85 km de la gare centrale de Nîmes, à 14,3 km de Tarascon, à 27,8 km d’Arles et à 35 km d’Avignon-Ville.

 La création de la gare nouvelle a imposé la construction de deux ponts-rails de part et d’autre des deux voies directes du CNM pour porter les deux voies encadrantes et leurs quais respectifs. Ces trois ouvrages offrent un dégagement suffisant au niveau inférieur pour les deux voies de la ligne classique, leurs quais, une éventuelle troisième voie le long du quai nord, un passage routier de service côté nord et un vaste passage piétons sous les voies du CNM entre l’entrée Ouest et son hall principal (« Paris »), et le hall plus modeste Est (« Barcelone »).

NimesBâtiment voyageurs de la gare de Nîmes-Pont-du-Gard en cours de construction. Un important développement vertical réunit les deux plans de voies, grande vitesse au niveau supérieur, TER au niveau inférieur. (SNCF Réseau)

  Le parti a consisté à conserver au mieux les composants du paysage préexistants et l’esprit du lieu, dans un environnement bouleversé par les voies nouvelles et leurs nombreux raccordements. Outre la réhabilitation du Mas Larrier, les boisés ont été protégés. Les architectes ont choisi un béton de façade aux couleurs locales, obtenu par broyage de matériau coloré de la région.

 Le bâtiment voyageurs, situé dans l’angle sud-ouest formé par les deux lignes, est un cube de verre supporté par de hauts poteaux de bois lamellé-collé. Ce cube est posé sur le sol naturel, soit en légère surélévation par rapport au plan des voies de la ligne historique en déblai. Sa hauteur dépasse le niveau du quai de la voie paire du CNM, permettant une sortie directe depuis l’espace protégé pour accéder aux TGV en direction du nord - les trains roulant à gauche. L’accès aux TGV en direction du sud s’opère par une montée protégée côté entrée « Barcelone » (dans le quart  sud-est). Au niveau du sol naturel, cette dernière sera équipée d’une façade vitrée à mi-hauteur sous toiture à deux pans, soit hors d’eau mais non hors d’air.  Notons que le long des voies inférieures, un bâtiment de service posé tout au long du quai sud s’amorce à l’intérieur du cube de verre du bâtiment voyageurs pour s’étendre à l’extérieur vers l’ouest. Un petit bâtiment destiné aux loueurs d’automobiles est bâti dans les importants parkings et stations bus au-delà de la gare.

Les parois vitrées laissent apparaître les circulations verticales et les connexions entre ses différents éléments. De grandes rampes paysagères organisent les flux des piétons vers les quais. La conception du bâtiment voyageurs cubique est originale. Première mondiale, des poteaux de bois lamellé-collé supportent une structure métallique équipée d’une ombrière à lames fixes en composite et aluminium. Une verrière plafond est suspendue en-dessous, tandis que des murs-rideaux composés de larges panneaux de verre à structure porteuse indépendante ferment le volume. Des espaces de dilatation ont dû être ménagés entre ces deux structures, verrière sur supports bois et murs-rideaux. Les chaleurs estivales seront modérées à l’intérieur par ventilation et brumisation, comme dans la vaste gare Saint-Roch de Montpellier récemment agrandie.

Coût du projet 83 millions d’euros, suffisamment pour sauver plusieurs "petites" lignes

 Notons que l’autre spécificité de Nîmes-Pont-du-Gard est ce béton coloré façon terroir à teinte rousse, voulu par les architectes pour les surfaces béton (bâtiment de service et autres façades opaques). Les matériaux ont été apportés de carrières situées à 30 km, avec coloration issue d’éléments naturels. L’extraction sur place a été écartée en raison de la présence d’argiles. Ce béton coloré n’ayant pas une qualité portante suffisante, il dû être coulé, sur 19 cm d’épaisseur, en parement de murs porteurs en béton classique de 20 cm d’épaisseur. Le parement béton coloré est accroché aux murs porteurs par des cornières sans appui au sol.

 Le coût total du projet, un temps évalué à quelque 120 millions d’euros, a été ramené dans un premier temps à 95 millions d’euros. Un phasage a encore permis de réduire le devis à  83 millions d’euros (à titre de comparaison, la gare de Montpellier-Sud-de-France a coûté environ 140 millions d’euros). SNCF Réseau, en particulier, n’a pas équipé les voies de la ligne à grande vitesse d’aiguillages en amont et en aval de la gare nouvelle. Mais ces 83 millions d’euros auraient suffi à sauver plusieurs lignes de desserte fine d'une liquidation : on a eu ainsi le plus grand mal à rassembler ces jours-ci 28 millions d’euros pour pérenniser à court terme la ligne de Grenoble à Veynes longue de 103km (notre article du 6 décembre 2019).

 Notons que la distance entre la fin de la LGV Méditerranée (à environ 2km en amont de la gare de Nîmes-Pont-du-Gard) et Montpellier-Saint-Roch par la ligne classique est de 63,7 km, celle entre la fin de la LGV Méditerranée et Montpellier-Sud-de-France par le CNM est de 56,6 km soit une différence assez minime de 7,09 km (ou - 11%). La vitesse maximale sur le CNM est pour l’instant de 220 km/h bien que le tracé soit conçu pour 320 km/h (la vitesse serait relevée lors de l’extension vers le sud). Dans l’avenir, lorsque la LNMP sera construite jusqu’à Béziers ou Narbonne, l’arrêt de circulations à grande vitesse tous les 50km risque de poser un vrai problème commercial.

DSCN2237Façade monumentale de la gare de Nîmes Centre (ci-dessus), gare entièrement rénovée voici une décennie et étendue côté sud (ci-dessous). Les occurences de correspondances TER-TGV y seront divisées par deux à partir de ce mois avec report très partiel sur Nîmes-Pont-du-Gard. © RDS

DSCN2239

Cet établissement a été dénommé « Nîmes-Pont-du-Gard » en référence au célèbre ouvrage romain du Ier siècle après J.-C. Bien qu’éloignée de 22 km du monument, soit un peu plus que ne l’est la ville de Nîmes, les élus ont tenu à faire de l’aqueduc, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1985, un atout de plus pour cette gare qui en aura bien besoin.

Pour la moitié des Nîmes-Centre-Paris, deux liaisons TER-TGV sont prévues via  Pont-du-Gard, toutes les autres sont des liaisons TGV-TGV via Lyon-Part-Dieu

 De fait, le report d’environ la moitié de la  quarantaine de circulation à grande vitesse de la ligne classique vers la ligne nouvelle va induire pour les personnes provenant de la ville de Nîmes et de ses périphéries les plus peuplées nord et nord-est (résidentielles) et ouest (populaire) un allongement du temps de parcours considérable, sans aucun gain de temps sur la section à grande vitesse. La situation est plus pénalisant encore pour les voyageurs provenant d'Alès et au-delà, de Lunel, du Grau-du-Roi, soumis à deux correspondances. La partie du territoire  nîmois dans laquelle est située la gare nouvelle est de loin la plus agricole et la moins urbanisée, même si les autorités locales prévoient de bétonner les environs. Un important flux automobile supplémentaire est donc à prévoir, ce qui ne va pas précisément dans le sens du report modal. Pas plus les quelques navettes de bus organisées avec battement de 30mn et parcours noyé dans la circulation routière parallèlement à la voie ferrée.

 

DSCN1131AGC s'apprêtant à assurer un TER Alès-Nîmes Centre. L'accession aux destinations des désormais nombreux TGV transitant par Nîmes-Pont-du-Gard nécessitera deux correspondances et des allongements de temps de parcours rédhibitoires. Une autre façon de marginaliser la France des périphéries... © RDS

 Ainsi pour Paris, une correspondance TER-TGV à Nîmes-Pont-du-Gard ou TGV-TGV à Lyon-Part-Dieu (cette dernière privilégiée par l’horaire internet) sera désormais indispensable pour environ la moitié des relations. Le temps de parcours total sera ainsi porté de 3 heures environ à 4 heures voire 4 h 30mn pour les relations TGV-TGV, et à 3h30mn voire 4 heures environ pour les deux seules relations TER-TGV répertoriées par l’horaire SNCF en ligne alors que l’on vantait une desserte de la gare de Nîmes-Pont-du-Gard par « quarante TER » deux sens confondus.

 Il se trouve en effet que la trame TER Occitanie n’est pas conçue pour donner ou relever des correspondances à Nîmes-Pont-du-Gard. L’un des deux seules relations TER-TGV proposée par le site de réservation SNCF impose par exemple 57 mn d’attente à Nîmes-Pont-du-Gard. Pour les autres possibilités de correspondances TER-TGV, il convient de se munir des horaires TER d’une part, des horaires TGV à la gare nouvelle d’autre part et d’établir soi-même son plan de déplacement. C’est l’un des miracles de la conception en silos du service ferroviaire en France désormais : les grandes lignes et les lignes régionales se tournent le dos.

 

PRESENTATION DE LA GARE NÎMES PONT DU GARE | SNCF Réseau

Votre croissance passe aussi par nos lignes ferroviaires :

https://www.sncf-reseau.com

 

Nîmes Pont-du-Gard

Située entre Manduel et Redessan, le chantier de la nouvelle gare de Nîmes, qui s'inscrit dans le projet du contournement ferroviaire de Nîmes et de Montpellier (CNM) progresse. Architecte de la nouvelle gare, AREP est avec sa filiale AREP Ville, maître d'œuvre pour la conception des aménagements extérieurs qui s'étendent sur plus de 19 ha.

https://www.arep.fr


 

Gare nouvelle Nîmes Pont du Gard

Sur le contournement ferroviaire de Nîmes et Montpellier qui sera mis en service fin 2017, une gare nouvelle située sur les communes de Manduel et Redessan ouvrira ses portes fin 2019.

https://www.nimes-pont-du-gard.fr

 

 

 

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Commentaires
P
Venant d ales pour aller travailler sur Paris, je confirme que tout ceci me complique bien la vie : temps de trajet très rallongé avec parfois tout simplement l impossibilité de prendre la dernière correspondance pour ales si je prends le tgv de 18 h 14 en provenance de Paris (heure de départ assez courante et coïncidant avec des horaires de travail !). Idem si je dois me déplacer sur Lyon, je suis obligée de partir en plein milieu de l après midi le dimanche d ales pour avoir le ter qui va m amener à Nîmes Pont du Gard pour prendre enfin le dernier tgv pour Lyon afin d être à l heure le lendemain matin pour les réunions de travail : durée du voyage 4 h 09 !!! Ou est il l heureux temps où ales Lyon se faisait en 2 h !!!<br /> <br /> Vraiment n importe quoi
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Raildusud : l'observateur ferroviaire du grand Sud-Est
  • Le chemin de fer est indispensable à toutes nos villes et ne doit pas être l'apanage de la seule région-capitale. Les lignes transversales, régionales et interrégionales doivent contribuer à une France multipolaire, équitable au plan social et territorial.
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