Perpignan-Villefranche : SNCF Réseau débroussaille et restaure pour réouverture en mars, Occitanie compte aller bien plus loin

 Le retour des trains sur la ligne Perpignan-Villefranche-Vernet-les-Bains, qui donne correspondance au Train Jaune vers la Cerdagne et Latour-de-Carol-Enveitg ne devrait pas pouvoir intervenir avant mars 2020. La ligne a été interrompue pendant près de deux années sur ordre de la justice pour permettre, selon les magistrats, d’enquêter sur l’accident au passage à niveau de Millas du 14 décembre 2017 (notre article du 28 septembre 2019). Les scellés judiciaires ont été levés le 21 octobre, permettant à SNCF Réseau d’en récupérer la jouissance. Cette interminable neutralisation, qui revenait à faire porter aux usagers du rail toutes les conséquences d’un drame dont la responsabilité est revenue à la conductrice du car heurté par le train, a illustré de façon caricaturale les inconséquences d’une certaine conception du service de l’Etat.

 De fait, cette ligne longue de 47km qui dessert la grande périphérie de Perpignan et la basse vallée de la Têt jusqu’à la magnifique localité fortifiée de Villefranche-de-Conflent, est redevenue en deux années d’absence totale d’entretien par endroits une véritable jungle. De ce fait sa réactivation va exiger, selon l’évaluation de SNCF Réseau, environ cinq mois, trahissant l’abandon de la ligne depuis l’accident alors que des interventions depuis le réseau routier eussent pu limiter la dégradation de sa superstructure, l’envahissement par la végétation en particulier. Cet axe structurant pour tout le département est indispensable pour les parcours pendulaires comme pour l'accès au Train Jaune.

La région Occitanie va investir pour aller au-delà de la restauration à l’état antérieur

 Pour l’instant, il n’est question que de retour à l’état antérieur en matière de service TER. Notons que la ligne avait été rénovée en grande partie autour de 2006, permettant à terme de retrouver une vitesse de fond de 100km/h. La région Occitanie va investir – alors que la ligne est partie du réseau ferré national propriété de l’Etat via SNCF Réseau – pour profiter des travaux de restauration afin d’aller un peu au-delà. Un million d’euros seront ainsi dépensés à cette fin, financés à 93% par la Région et à 7% par SNCF Réseau.  Ainsi, dès 2020, un renouvellement de ballast sur la voie C en gare terminus de Villefranche-Vernet-les-Bains  va être opéré. Notons aussi le remplacement de 250 traverses en bois sur la section terminale Prades-Villefranche et de 200 autres sur la voie d’évitement de l’Ile-sur-Têt pour respectivement 98.000 et 70.000 euros. L’Ile-sur-Têt est situé en milieu de ligne, à 21,9km de Perpignan et 23,7km de Villefranche. Des renouvellements de câbles, des remplacements d’ouvrages hydrauliques sont programmés.

Extrait de la carte officielle du Réseau ferré national, zone des Pyrénées-Orientales avec Aude et Espagne voisines. La ligne Perpignan-Villefranche est clairement un axe structurant pour tout le département.

 Mais l’Occitanie veut aller plus loin. Alors que le rétablissement en mars des circulations TER devrait se faire à l’identique, c’est-à-dire avec 8 allers-retours par jour,  malgré une demande d’augmentation de la fréquence par la présidente du Conseil régional Carole Delga, une étude préliminaire devrait être engagée pour programmer les opérations « indispensables à garantir la pérennité de la ligne et fait évoluer l’offre dans l’optique d’une meilleure desserte du périurbain et d’une desserte estivale », rapporte le site Actuteroccitanie  (lien disponible en fin d’article).

 Pour ce faire, il conviendra de rétablir l’évitement de Prades (gare rénovée et projet de rabattement bus), à 5,2km de Villefranche, permettant ainsi un raccourcissement de l’intervalle minimum entre deux circulations de même sens deux sens confondus. La région Occitanie compte aussi moderniser la signalisation sur le canton ouest Ile-sur-Têt-Villefranche, avec installation d’un Block automatique à permissivité restreint (BAPR). L’objectif est de permettre un cadencement aux 30 minutes en pointes simultanément dans les deux sens.

L’atout du Train Jaune, au-delà de Villefranche-Vernet-les-Bains

Au-delà, la région compte étendre le cadencement au Train Jaune, à l’heure de Villefranche à Font-Romeu et aux deux heures au-delà jusqu’à Latour-de-Carol. Avec un tel service, la ligne de Cerdagne à voie métrique (62,56km, dénivelé de 1.165m sur 31km en simple adhérence avec des rampes de 60mm/mètre !) pourrait retrouver sa place parmi les lignes assurant une desserte régionale compétitive tout en constituant une attractivité touristique mondiale aux côtés des meilleures lignes helvétiques. La ligne du Train Jaune a fait l’objet de rénovations importantes (voie et ouvrages d’art) depuis une décennie. Cette année, trois tunnels ont été rénovés, avec rétablissement du trafic après suspension le 5 avril dernier. Sa situation frontalière et sa promixité de la Méditerranée lui vaut déjà une renommée internationale. Son accessibilité ferroviaire depuis Perpignan, qui voit passer des TGV depuis Madrid, Barcelone, Marseille, Lyon ou Paris paraît indispensable.

 Pour l’histoire,  rappelons que la ligne Perpignan-Villefranche, mise en service en 1895 sur la totalité de son parcours, fut le théâtre de l’expérimentation de la première électrification par la Compagnie du Midi, en pointe dans ce domaine.  Dès 1912, le Midi installe une caténaire alimentée en courant alternatif 12kV, à la fréquence de 16 2/3Hz adoptée par les réseaux d’Europe centrale (Allemagne, Suisse…, qui fonctionnent en 15kV) (1). Mais sur ordre de l’Etat, en 1920, les compagnies durent appliquer uniformément la tension de 1,5kV en courant continu lors de leurs électrifications. Cette ligne demeura néanmoins une « enclave » électrique en 12kV jusqu’à sa désélectrification en 1971. Il fallut attendre  1984 pour que la ligne soit réélectrifiée, cette fois en 1,5kV cc dans la foulée de la mise sous tension de Narbonne-Port-Bou.

(1) Le PLM expérimenta de son côté en 1911 une électrification en monophasé de même tension (12kV) mais à la fréquence de 25Hz sur 7,5km entre Grasse et Mouans-Sartoux, dans la perspective d'une électrification de Marseille-Vintimille. L'expérience fut sans lendemain. La totalité du parcours Marseille-Vintimille ne fut électrifiée qu'en 1969, en 25kV 50Hz.

Réouverture et travaux en Conflent

C'est officiel depuis ce lundi 21 octobre 2019, et après 22 mois de fermeture suite à l'accident de Millas, la ligne Perpignan - Villefranche-Vernet-les-Bains est restituée à SNCF Réseau. Une suspension inédite et qui a laissé des traces nécessitant d'entreprendre des travaux pour reconstruire le passage à niveau, débroussailler le parcours entier et effectuer de...

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